LE FILS DE LA BÊTE.

Chapitre 1

Quin

 

Je n’arrivais pas à croire que Lou m’ait convaincue de faire ça. L’instant précédent, elle dit que je vais devenir sauvage si je ne sors pas pour rencontrer quelqu’un, et, avant que je ne m’en rende compte, je me retrouve en train de lui hurler que ce n’est pas comme ça que l’on devient sauvage. Elle a ensuite dit qu’au contraire c’était exactement ça et m’a inventé une histoire à propos d’un chien devenu fou à force de passer ses journées attaché.

Aussi insultant qu’il ait été de me comparer à un chien, je devais admettre qu’elle n’avait pas complètement tort. Je luttais avec qui j’étais. Etais-je la fille de mon père, comme il le disait toujours ? Ou étais-je la chose que voyait le reste du monde et que je tentais en permanence de contenir ?

Quoi qu’il en soit, ma vie était nulle. Je veux dire, si j’avais tout ce que n’importe qui pouvait vouloir grâce aux recherches en génétiques extrêmement fructueuses de mon père, cela était accompagné d’une contrepartie qui faisait que ça n’en valait pas la peine.

Mon père pensait rendre service au monde en soignant l’infertilité. Et, puisque ma mère était stérile, elle devint son premier sujet d’expérimentation. J’étais la preuve que ça avait marché. Mais il y avait eu un effet secondaire que personne n’aurait pu imaginer.

Ma mère était morte à cause de cet effet secondaire. Je m’enfermais à double tour à cause de ce même effet. Et, à cause de ça, j’étais terrifiée par la pleine lune.

Ce n’est pas comme si je pensais que quoi que ce soit allait m’arriver lors de la pleine lune. Il y a eu de nombreuses pleines lunes depuis la première fois et je crois en la science.

Ce qui me terrifiait dans tout ça, c’était ce que les autres allaient penser qu’il puisse se passer. S’ils avaient entendu parler de moi — et qui n’avait pas entendu parler de moi à cause de mon frimeur de père — et qu’ils me voyaient sortir lors d’une nuit de pleine lune, toutes les histoires folles que l’on leur aura lues feront de moi un monstre à leurs yeux.

Je ne voulais ressentir ni leur jugement ni leur terreur. Plus que ça, je ne voulais pas le sentir. On m’a expliqué que j’étais la seule à m’en rendre compte, mais l’odeur des gens était accablante. C’était une des raisons pour lesquelles je m’enfermais dans ma chambre universitaire lorsque je n’allais pas en cours. Enfin ça et le fait que personne dans l’Université d’East Tennessee ne m’ait reconnu et que je voulais qu’il en reste ainsi.

La seule personne qui était au courant de ma condition était Louise, ma colocataire et première vraie amie. Je lui avais dit après que l’Université nous ai mises ensemble et que j’ai décidé de m’inscrire. Grâce à mon éducation à domicile et au fait que j’avais hérité des capacités intellectuelles de mon père, j’avais eu l’équivalent d’une éducation post-lycée depuis mes 16 ans. Et quatre ans représentaient un long laps de temps pour découvrir ce que j’allais faire de ma vie.

Ce n’était pas comme si j’aurais un jour besoin de trouver un travail ou que je ne pourrais pas obtenir l’équivalent de mon diplôme en sciences génétiques simplement en travaillant avec mon père. Mais il y avait une chose qui me manquait et je savais que je ne pouvais pas continuer à vivre comme je le faisais. Enfermée dans notre penthouse new-yorkais, je n’aurais jamais de vraie vie. Je n’aurais jamais de vrais amis. Je ne coucherais jamais avec quelqu’un.

Je voulais coucher avec quelqu’un. Durant une certaine période du mois, c’était tout ce à quoi je pouvais penser. La pleine lune ne me transformait peut-être pas en bête sauvage mi-humaine mi-monstre, mais elle me faisait penser au sexe comme si c’était un besoin primaire. Plus je vieillissais, plus ça empirait.

Est-ce qu’il y avait une chance que ne pas sortir de ma chambre puisse me rendre sauvage comme l’avait suggérée Lou ? Je ne le pensais pas. J’avais bien plus de contrôle sur ces choses par rapport à l’époque où j’étais enfant. Si ça avait été un problème de boisson plutôt que ce dont il s’agissait vraiment, j’aurais pu dire que je n’avais pas bu un verre depuis des années.

Mais, que Lou plaisante ou pas, je ne voulais pas qu’elle croie que le fait que je devienne sauvage soit une possibilité. Donc, après quelques cris et une dispute, j’ai cherché la seule fête se déroulant ce soir sur le campus et me suis habillée pour y aller.

« Enfin, » dit Lou alors que je me dirigeais vers la porte.

Ce qui m’a tué fut qu’après notre longue dispute, je suis partie et qu’elle avait un sourire sur le visage. C’était comme si cela avait été son plan depuis le début et que j’étais la seule à m’être mise en colère. Elle m’avait manipulée pour me faire sortir et me trouver une vie. Cette petite diva fourbe !

« Et je veux une preuve que tu n’es pas juste allée dans un parc chasser des écureuils ou je ne sais pas quoi. »

« Je ne chasse pas les écureuils ! » Ai-je protesté avec véhémence.  

« Si tu le dis, mais lorsque je reviendrai de mon rencard, je veux voir un homme nu dans ton lit, et je veux voir de la honte, mademoiselle. En quantité. »

« Il y en aura ! Tu en auras tout ton saoul. Parce que tu auras complètement tort à propos… Et tout ça. »

« Bien. »

« Bien. »

« Je suis sérieuse, Quin. »

« Moi aussi. »

Donc me voilà où j’en étais, marchant à travers le campus en direction de la seule fête que mes recherches de dernière minute aient pu trouver. L’équipe de football de l’université d’East Tennessee avait battu l’université de West Tennessee, leur rival local et la fraternité des joueurs organisaient une fête. Rien de tout ça ne me paraissait amusant, mais j’y allais… Parce que Lou m’avait piégée. Et dire que je pensais être la plus intelligente des deux.

Très bien, j’irais… J’obtiendrais des preuves de ma présence, puis j’irais dans un coffee shop et lirais un livre sur mon téléphone.

Je savais qu’elle avait parlé de trouver une personne nue dans mon lit, mais il était impossible que ça se produise. Croyez-moi, j’avais essayé. Mais, dès que quiconque me regardait d’un peu plus près et réalisait qui j’étais, ils se mettaient soit à parler de me mettre en laisse au cas où je me transforme devant eux en pleine partie de jambes en l’air soit ils s’enfuyaient à toutes jambes.

Non, j’allais devoir accepter de passer le reste de ma vie comme une triste vierge solitaire.

Est-ce que je venais de m’autohumilier ? Je crois que oui. À cet instant, je n’étais vraiment pas d’humeur pour une fête.

Une fois arrivée au coin de la rue, j’ai pu entendre la musique venant de la maison de la fraternité avant de la voir. Ma colère envers Lou continuait à me pousser à avancer, mais ses effets diminuaient rapidement. L’autre problème dans la façon dont j’avais grandi était que je n’étais pas très douée pour les trucs humains. Réalisant enfin ce que j’étais en train de faire, j’ai compris que

Jamais je n’allais pouvoir me mélanger ou me faire des amies ou quoi que ce soit que faisaient les gens de mon âge.

Nouveau plan : je n’allais pas y aller. J’allais obtenir ma preuve par contre. J’allais m’approcher d’une des personnes se trouvant dehors, demander de prendre un selfie avec elle, puis partir d’ici le plus rapidement possible.

En regardant autour de moi, j’ai vu des gens en train de fumer, de parler en cercle avec des verres rouges et un type qui se tenait tout seul. Cela rendit la sélection facile. Tout ce que j’avais à faire c’était de l’aborder, lui demander de prendre un selfie, le faire et partir. Je pouvais faire ça. Je n’étais pas une malade finie, je pouvais parler à une personne.

J’ai serré les lèvres, rassemblé mon courage et me suis approchée rapidement. Je n’allais pas trop réfléchir. J’allais juste le faire et en finir.

« Excuse-moi, je peux faire un selfie avec toi ? » Ai-je demandé à l’homme qui me tournait le dos.

« Tu veux faire un selfie avec moi ? Pourquoi ? » Dit le garçon avec une pointe d’irritation dans la voix alors qu’il se tournait.

Waouh !

Vous vous souvenez de cette sensation lorsque vous voyez quelque chose qui vous coupe le souffle ? Des chatouillis chauds commencent dans le dos de vos mains et montent dans vos bras avant de s’installer dans votre visage alors que la chaleur vous fait tourner la tête ? C’est ce qui s’est passé lorsque nos regards se sont croisés. Ce type était magnifique.

Sa peau couleur crème contrastait avec ses cheveux d’un noir de jais et ses yeux bleu océan. Sa mâchoire semblait gravée dans du marbre. Il avait des fossettes, tellement de fossettes. Et ses muscles visibles semblaient eux-mêmes avoir des muscles.

En plus de ça, il sentait délicieusement bon. Il avait un doux musc qui je n’avais jamais senti de ma vie. Rien que de me tenir là était enivrant. L’odeur qui se dégageait de lui me priva de mon libre arbitre. C’était comme s’il m’avait mise en laisse tout en réveillant la partie de moi avec laquelle je luttais en permanence afin de la contenir.

Je ne pouvais pas parler et il attendait clairement que je le fasse. Il m’avait posé une question. Qu’est-ce que c’était ? Ah ouais ! C’était pourquoi je voulais un selfie avec lui, ce qui semblait le contrarier.

Est-ce que je l’avais mis en colère ? Est-ce qu’il était bizarre de demander un selfie à un total inconnu ? C’était probablement le cas ! Merde ! À quoi est-ce que je pensais ?

« Désolée, » ai-je marmonné avant de forcer mes jambes à avancer dans la direction opposée.

J’ai fait deux pas avant qu’il ne reprenne la parole.

« Attends ! Ne pars pas. »

Je me suis arrêtée.

« Je suis désolé. Je ne voulais pas être brusque. Si tu veux un selfie, j’en prendrais un avec toi. »

« Non, ce n’est rien, » ai-je dit, voulant le regarder à nouveau, mais ayant peur d’en perdre le souffle si je le faisais.

« Non vraiment. Ce n’est rien. Tu peux en prendre un. Je ne sais pas pourquoi quiconque voudrait faire ça. Mais ce n’est rien. Je serais content d’en prendre un avec toi. »

C’est alors que je l’ai regardé à nouveau. Je comprenais ce qu’il disait. Il parlait comme un type qui avait l’habitude que les gens demandent à prendre une photo avec lui. Je savais ce que c’était. Qui ne voulait pas prendre une photo avec Harlequin Toro, la seule métamorphe louve sur terre ?

Ce n’était que moi ceci dit. Pourquoi est-ce que les gens lui demandaient des selfies ? C’était le plus bel homme que j’avais jamais vu. Est-ce que des inconnus venaient le voir, impressionnés par sa beauté ? Je ne serais pas surprise que ce soit le cas.

« Je, humm, ne demandais pas un selfie parce que je sais qui tu es. Je ne te reconnais pas. Je ne sais pas qui tu es, » ai-je expliqué.

Le type recula la tête, surpris. Alors que je l’ai regardé, sa peau pâle devint rose.

« Oh ! D’accord. Alors… » Il secoua la tête comme s’il essayait d’en décrocher quelque chose. « Je suis désolé, pourquoi est-ce que tu veux faire un selfie avec moi ? »

« Ce n’était pas toi, c’était avec n’importe qui, » lui ai-je dit.

« Tu voulais un selfie avec n’importe qui ? Pourquoi ? »

J’ai soufflé alors que j’ai repensé à ma situation frustrante.

« C’est ma colocataire. Elle m’a dit que je devais sortir et m’amuser. Elle a dit qu’elle voulait une preuve… »

« Et le selfie allait être cette preuve ? »

« Ouais. »

« Donc après que tu aies pris le selfie… Quoi ? Tu allais partir ? »

« Ouais, » ai-je admis, commençant brusquement à me dégonfler.

L’homme magnifique me regarda comme si j’étais un monstre. Un sourire se dessina sur son visage. Cela m’aurait donné un mauvais pressentiment si, à la place, il ne m’avait pas plutôt donné envie de fondre dans la pelouse.

« Ça va te paraitre fou, mais puisque tu es là, pourquoi ne pas entrer et t’amuser un peu pour de bon ? »

« Je ne suis pas douée pour ce genre de choses. Tu sais, se socialiser. »

« Par chance, c’est un domaine dans lequel je suis très doué. Et si nous passions un marché ? Je te donnerais ton selfie comme preuve pour ta colocataire, mais tu dois entrer et réellement essayer de passer un bon moment. Je vais te présenter quelques personnes. Comme ça, lorsque ta colocataire te posera des questions sur ta soirée, tu n’auras pas à mentir, » dit-il alors que son visage explosait en une myriade de fossettes.

Je l’ai regardé. « Pourquoi est-ce que tu ferais une chose pareille ? »

Il m’a regardé en penchant la tête, perplexe.

« Peut-être que je suis simplement sympa. Peut-être que je trouve que tu es cool et qu’il serait sympa de trainer ensemble. Peut-être que je te drague. »

Un frisson me parcourut en entendant le mot « draguer ». Que se passait-il ? Est-ce que je plaisais à ce type ? Est-ce qu’il se passait quelque chose entre nous ? Est-ce qu’il y allait avoir un type nu et honteux dans mon lit lorsque Lou rentrerait après tout ?

« Humm, d’accord, » ai-je dit, certaine que je devenais rouge vif.

« Cage, au fait. »

« Quoi ? »

« Mon nom. » Il m’a regardé. « Et toi tu t’appelles ? »

« Oh. Quin. »

« Cool. J’aime ce nom. »

« Merci, c’est un cadeau de mes parents, » dis-je, perdant le contrôle de ma langue.

Cage éclata de rire.

« Je veux dire, évidemment que mes parents me l’ont donné. »

« Ce n’est pas forcément évident. Mes parents ne m’ont pas appelé Cage. »

« Qui l’a fait ? Un oncle ou quelqu’un ? »

« Non, c’est moi. »

« Alors quel est ton nom de naissance ? »

Cage me regarda comme si ses pensées se télescopaient dans sa tête. « Et si je t’emmenais à l’intérieur et que je te faisais visiter ? »

« Donc, je suppose que nous allons oublier cette question ? »

Cage lâcha un rire inconfortable.

Il me guida en haut des escaliers avant de me faire passer sur le porche puis entrer dans la maison de la fraternité. Il était difficile de le quitter des yeux. Lorsque je l’ai fait, j’ai été surprise par ce que j’ai vu. Je ne sais pas à quoi je m’attendais, mais pas à ça. Le large salon était peu décoré, mais rempli de monde. Tout le monde avait un verre rouge à la main et se parlait comme s’ils étaient amis.

« Il est encore tôt, » expliqua Cage.

« Comment ça ? » Ai-je dit en élevant la voix par-dessus la musique country-pop.

« Il y aura plus de monde plus tard. »

« Plus que ça ? » Ai-je demandé en regardant ce qui me semblait être une horde.

Cage rit doucement. « Ouais. »

« Merde. D’accord. »

« Cage ! » Dit un type imposant en passant ses bras autour de Cage, me faisant renverser sa boisson sur le t-shirt de Cage. « Oh, je t’ai mouillé ? »

« Ce n’est rien, » dit Cage d’un ton détendu. « Dans, voici Quin. »

Dan se tourna vers moi et me fixa du regard. « Quin ! » Dit-il, mettant enfin un terme à la gêne. « Est-ce qu’il tente de te recruter ? »

« Quoi ? » Ai-je demandé, perplexe.

« Est-ce qu’il essaie de te faire entrer dans l’équipe de foot ? »

Je l’ai regardé, ne comprenant pas ce qui se passait. Est-ce qu’il était sérieux ? Me prenait-il pour un garçon ? Ce n’était pas comme si ça n’était jamais arrivé auparavant. En plus de tout le reste, la fée des seins n’avait pas été très généreuse avec moi.

Mais même s’il pensait que j’étais un garçon, j’aurais été un poids plume. Je n’étais pas vraiment bâtie comme un type qui se jetait à toute vitesse contre des hommes de 100 kilos.

« L’équipe de foot ? »

Je me suis tournée vers Cage, perplexe.

Cage sourit. « Ne fais pas attention à Dan, il a pris quelques coups de trop. »

« De rien au fait, » dit Dan, sur la défensive.

« Vous faites tous les deux partie de l’équipe de foot ? » Ai-je demandé, comprenant ce qui se passait.

Dan arrêta de jouer au sportif idiot et passa à nouveau les bras autour de Cage. « Non. Moi je fais partie de l’équipe. Lui, c’est l’équipe. »

J’ai regardé Cage, cherchant une explication.

Il fit un sourire humble. « Je suis le quarterback. »

« Cet homme n’est pas simplement le quarterback, » dit Dan d’un ton moqueur. « C’est le type qui va nous mener à la victoire en championnat national puis va devenir pro. »

« Ohhhh ! Je comprends à présent. Le selfie. Tu pensais que je te demandais un selfie parce que tu es un joueur de foot connu. »

« Je ne suis pas un joueur de foot connu, » dit-il rapidement.

« Évidemment qu’il est connu. Il n’y a personne qui ne sache pas qui il est, » dit Dan fièrement.

J’ai regardé Cage pour voir sa réaction. Cage me rendit mon regard et lâcha un rire gêné.

« Tout le monde ne sait pas qui je suis. »

« Montre-moi une personne qui l’ignore, » le mit au défi, Dan.

Il me fit un sourire entendu. « Quin, tu veux un verre ? Je crois que tu as besoin d’un verre. Suis-moi.

« Content d’avoir fait ta connaissance, Quin, » dit Dan avant de s’éloigner.

« Donc, tu es un quarterback ? »

« Tu n’as pas entendu ? Je ne suis pas juste un quarterback, je suis l’équipe, » dit Cage d’un ton plein d’autodérision.

J’ai éclaté de rire. « J’ai entendu. Tu vas devenir pro ? »

« Bien sûr, » dit Cage sans enthousiasme avant de se tourner pour verser de la bière dans deux verres rouges.

« Tu n’as pas l’air impatient. »

« Non. C’est génial. Je suis pressé de jouer en NFL. C’est, ah, tout ce pour quoi j’ai travaillé, » dit-il en me tendant le verre et en le tenant en l’air pour trinquer avec moi. « Aux nouveaux amis. »

J’ai touché son verre et ai pris une gorgée. « Cette bière est terrible, » ai-je dit en baissant les yeux vers mon verre.

Cage éclata de rire. « Non, dis-moi ce que tu penses vraiment. »

« Je voulais déjà dire qu’elle n’est pas très bonne, » ai-je expliqué.

Cage rit encore plus fort. « Tu n’as pas vraiment de filtre, pas vrai ? »

Je me suis figée. Ce n’était pas la première fois que quelqu’un me disait ça.

« Je suppose que non. C’est une mauvaise chose ? »

« En fait, je trouve ça assez rafraichissant. »

« Oh, d’accord, » dis-je, tombant encore plus sous son charme.

« Tu as un beau sourire. »

« Je n’avais pas réalisé que je souriais, » lui ai-je dit.

« C’est le cas, » me dit-il en souriant à son tour.

« Toi aussi. C’est très agréable, » lui dis-je, sentant mon cœur s’emballer et ne sachant pas quoi faire pour y remédier.

. Cage arrêta de sourire et me regarda dans les yeux. Mon Dieu, ce que j’avais envie de l’embrasser !

« Je suppose que si je te demande si tu t’amuses, tu vas me dire la vérité. »

« Je m’amuse, » dis-je en m’approchant plus près, au cas où il veuille m’embrasser.

Cage me regarda avec un air malicieux dans le regard. J’aurais pu jurer qu’il était sur le point de poser ses lèvres sur les miennes lorsqu’il dit, « Pourquoi est-ce que je ne te présenterais pas quelques personnes de plus ? »

« Plus de monde ? J’ai déjà vu deux personnes. Combien de gens supplémentaires peut-on rencontrer en une soirée ? »

« Haha. Encore un peu plus que ça, » dit-il en glissant sa main autour de mon épaule et en m’emmenant au loin.

Sentir son contact déclencha quelque chose en moi que je pouvais à peine contrôler. C’était la partie de moi que je luttais pour la réfréner. Elle cherchait à se libérer. Je savais que j’aurais dû faire tout ce qui était en mon pouvoir pour y résister, mais je n’avais pas envie de le faire. Elle était accompagnée d’une sensation de puissance que je n’avais jamais ressentie auparavant. J’aimais ça. Cela me faisait me sentir… forte.

Malgré à quel point j’avais envie de tout lâcher, j’ai fait de mon mieux pour rester avec Cage sous ma forme actuelle. Il me guida dans la soirée, me présentant les personnes présentes. Il ne plaisantait pas quand il disait être doué pour se sociabiliser. Tous ceux à qui il me présentait étaient pendus à ses lèvres. Et, lorsque c’était à mon tour de parler, ils étaient aussi pendus aux miennes.

Ce genre d’interaction avait toujours été très difficile pour moi. Mais, alors que j’étais en équilibre à la surface de mes émotions bouillonnantes, cette fois je me sentais… Vivante.

Ce qui me mettait encore plus dans un état second était que Cage saisissait la moindre opportunité pour me toucher. Il me touchait l’épaule quand il me présentait. Son doigt pointé restait posé sur mon avant-bras qu’il mettait l’emphase sur un argument. Et, lorsque nous nous tenions épaule comme épaule comme si nous étions un couple, La sienne effleurait doucement la mienne lorsqu’il riait.

J’étais sur le point de me transformer lorsqu’il en eut fini avec moi. Je savais que cela aurait dû me faire paniquer, mais à la place, je pensais à l’autre chose que Lou avait suggérée. À quoi ressemblerait Cage nu dans mon lit ?

Pendant que l’un de ses coéquipiers racontait une histoire en agitant les bras, je restais fixé sur Cage. Son attention complètement concentrée sur son ami, Cage sortit discrètement son téléphone de sa poche et y jeta un coup d’œil. Il le rangea rapidement et attendit que les bras aient fini de s’agiter avant de regarder son ami puis moi.

« Je déteste dire ça, mais je vais devoir y aller, » dit-il en posant sa main à l’arrière de mon bras.

« Oui, moi aussi, » ai-je dit rapidement.

« Ah ouais ? Où vas-tu ? » Demanda-t-il d’un ton enthousiaste.

« Je vais retourner dans ma chambre. »

« C’est où ? »

« Plaza Hall ? »

« Vraiment ? Je vais venir avec toi, » dit-il en me serrant le bras.

Mon cœur s’arrêta. Il allait venir avec moi ? Y étais-je ? Je n’arrivais pas à croire que ça allait peut-être vraiment arriver.

« Cool. »

Après avoir dit quelques au revoir, nous sommes sortis tous les deux dans la nuit. Alors que l’air frais entourait mon corps chaud, je me sentais excitée et dangereuse. J’avais besoin d’entendre sa voix. Je savais qu’elle me permettrait de garder le sens des réalités. Pourquoi ne disait-il rien ? N’était-il pas censé être celui des deux qui était doué pour ce genre de choses ? J’étais sur le point de marmonner quelque chose par désespoir, lorsqu’enfin, il dit :

« La nuit est claire. »

« Quoi ? »

« On peut voir toutes les étoiles, » dit-il en se tournant vers moi. « Tu as froid ? »

« Quoi ? »

« Tu frissonnes. »

Je tremblais. « Je suppose que je suis nerveuse, » ai-je admis.

« Qu’est-ce qui te rend nerveuse ? »

Mon visage se réchauffa. « Je l’ignore. »

Cage me regarda. « Tu es vraiment jolie, tu le sais ? »

« Toi aussi, je veux dire, tu es beau pas jolie, » lui dis-je, tremblant encore plus.

Cage rit doucement. « Merci. Tu es contente d’être venue ce soir ? »

« Ouais, absolument, » ai-je dit, luttant pour ne pas lui montrer à quel point.

« Nous y sommes, » dit-il alors que nous approchions de la porte de mon bâtiment.

« Nous y sommes, » ai-je répété le cœur battant. « Tu veux entrer ? »

« Entrer ? » Demanda Cage, pris par surprise.

« Oui, » ai-je répondu, luttant pour ne pas me jeter immédiatement sur lui.

« Ahhh, » marmonna-t-il avant que la porte ne s’ouvre et qu’une fille en sorte.

« Cage ! » Dit-elle avant de le prendre dans ses bras et de se mettre sur la pointe des pieds pour l’embrasser sur les lèvres.

Je suis restée bouche-bée, sous le choc. Que se passait-il ? Que venait-il d’arriver ?

La petite blonde au visage anguleux se tourna vers moi. « Qui est-ce ? »

« Ah, c’est Quin. Quin, je te présente Tasha. »

Tasha me lança un regard suspicieux alors que Cage semblait mal à l’aise.

« Tasha est ma petite-amie. »

« Comment connais-tu Cage ? » Me demanda Tasha.

J’étais trop surprise par tout ce qui se passait pour parler.

« Quin devait me demander un selfie. »

Tasha se tourna vers Cage, surprise. « Oh. Tu lui en as donné un ? »

« Pas encore, » dit Cage avec un sourire.

« Je peux le prendre, » se proposa Tasha. « Donne-moi ton téléphone, » dit-elle en s’approchant de moi en tendant la main.

Toujours sans voix, je lui ai donné mon téléphone et me suis tenu à côté de Cage.

« Dites ouistiti, » ordonna-t-elle.

« Ouistiti, » répondit Cage alors que je la regardais, sous le choc.

« Voilà, » dit-elle en me rendant mon téléphone. « Regarde-le. »

J’ai baissé la tête et ai vu mon humiliation sur mon écran. « Oui. »

« D’accord. Allons-y, j’ai faim, » dit Tasha en prenant le bras de Cage et le tirant au loin.

« J’ai été content de faire ta connaissance, » dit Cage en me regardant en partant.

« Contente de… te rencontrer, » ai-je marmonné, certaine qu’il ne pouvait plus m’entendre.

J’ai regardé le couple fait l’un pour l’autre s’éloigner. Évidemment qu’il avait une petite amie. Et, évidemment qu’elle ressemblait à ça. Mon cœur se serra en le regardant partir.

Je ne parvenais pas à croire que j’avais pu penser qu’il veuille être avec moi. Personne ne voulait jamais être avec moi. Comment avais-je pu être aussi idiote ? Comment avais-je pu penser qu’un type comme lui puisse s’intéresser à une fille comme moi ?

Une fois qu’ils eurent tous les deux disparu dans les ténèbres, je suis entrée dans le bâtiment. Alors que je montais les escaliers dans un état second, j’ai eu l’impression que j’allais exploser. Pourquoi est-ce que je ne plaisais jamais à personne ? Pourquoi est-ce que je ne plaisais pas à Cage ?

Je ne pouvais plus le supporter. Ma peau semblait vibrer avec une férocité que je n’avais pas ressentie depuis des années. Lorsque j’ai enfin réalisé ce qui se passait, il était trop tard.

« Oh non. Non, non, non, non, non, » ai-je dit, paniquée.

Alors que je bondissais en montant les escaliers, le monde qui m’entourait a semblé s’éloigner. Il fallait que je m’enferme. Je n’arrivais pas à y croire. Cela faisait des années. Pourquoi maintenant ? Pourquoi ici ?

En m’approchant de la porte de ma chambre étudiante, j’ai senti la dernière chose que je voulais sentir ou que je me serais attendue à sentir. Lou était à la maison. Que faisait-elle là ? N’avait-elle pas dit qu’elle avait un rencard ?

Je ne voulais pas qu’elle me voie comme ça. Je ne voulais pas que mon apparence véritable la terrifie. Je ne voulais pas accidentellement la tuer.

Était-ce ainsi que ma mère était morte ? Avais-je perdu le contrôle et lui avais-je arraché la gorge ? J’étais trop jeune pour m’en souvenir. Mais un enfant de trois ans et un loup de trois ans sont deux choses très différentes. Si je la laissais faire, est-ce que la bête au fond de moi m’enlèverait la seule personne à laquelle je tenais ?

Non, je ne pouvais pas la laisser faire. Je devais me réfugier derrière une porte verrouillée le plus rapidement possible. Sortant désespérément mes clés, j’ai ouvert la porte et ai foncé à l’intérieur.

« Tu n’es pas censée être dehors à te trouver un garçon ? » Dit-elle alors que je fonçais vers ma chambre. « Quin, qu’est-ce qui ne va pas ? »

Après avoir fermé la porte de ma chambre, j’ai cherché le loquet du verrou que j’avais installé. C’est à cet instant que j’ai fini par perdre le contrôle et ai fait ce que j’avais prié ne pas faire durant des années. La sensation était une vraie torture. Tout revint à toute vitesse.

Des picotements ont envahi tout mon corps, envoyant une sensation de brulure dans l’intégralité de mes terminaisons nerveuses. Mes muscles se sont contractés formant la pire crampe que vous puissiez imaginer. Et, alors que mes muscles se déchiraient et que je me mangeais moi-même, mes os se sont mis à craquer sous la pression.

Par chance, ce fut à cet instant que je me suis évanouie. C’était ainsi que ça se passait lorsque j’étais enfant. Du moins, c’était ainsi que ça avait commencé. Parce que quand j’étais enfant, je m’évanouissais dans un endroit et me réveillais nue et couverte de sang dans un autre.

Mon père testait régulièrement le sang pour s’assurer qu’il ne soit pas humain. Ça n’avait jamais été le cas. Mais, de temps à autre, des avis de recherche à propos de chat ayant disparu apparaissaient, placardés sur les murs de notre propriété au nord de New York.

Nos voisins savaient ce que j’étais donc ils avaient leurs soupçons, mais ils n’avaient jamais pu en être sûrs. La seule personne à m’avoir un jour vu me transformer était mon père. Et ce n’était que lorsqu’il avait déterminé que ni ma louve ni moi n’étions une menace qu’il était revenu dans l’appartement de Manhattan où ma mère était morte.

Cette transformation ne ressemblait en rien à ce que j’avais connu enfant, ceci dit. Cette fois, je me suis réveillée dans ma chambre, dans le noir. J’avais l’impression que c’était l’un de ces moments où vous vous réveillez, mais ne pouvez pas bouger votre corps. J’étais consciente, pleinement consciente. Mais, je marchais dans ma chambre, très près du sol et j’avais l’impression de ne pas être aux commandes.

J’avais beau tout essayer, je ne parvenais pas à m’arrêter. Ma commode est rapidement passée dans mon champ de vision alors que je me suis concentrée sur les sons qui m’entouraient. J’ai entendu un halètement sauvage. Oh non, j’étais dedans. J’étais le monstre.

La seule façon dont j’avais pu accepter qui j’étais avait été de me convaincre que je n’étais pas lui et qu’il n’était pas moi. Ce n’était pas moi qui avais tué ma mère. C’était lui. Il était dangereux et brutal. Moi pas.

Et pourtant, me voilà, en tain de prouver que tout ce à quoi je m’étais accrochée pour ne pas devenir folle était faux. J’étais éveille, même si je ne contrôlais rien, et je ressentais le monde autour de moi comme si ce corps était le mien.

« Quin, tout va bien ? » Demanda une petite voix depuis l’extérieur de ma porte.

Comme si l’on venait de lui mettre le feu, ma louve est devenue folle. Elle a foncé vers la porte et l’a attaqué comme s’il cherchait à la traverser.

« Oh non, le loquet, je ne l’ai pas mis, » me suis-je souvenue, terrifiée.

Dès que je l’ai dit, mes yeux se sont tournés vers la poignée de la porte et des griffes l’ont attaquée. Elle m’entendait et luttait pour sortir. Si elle y parvenait, elle tuerait Lou. J’en étais sûre. Elle tuerait tous ceux qui se trouveraient sur son chemin jusqu’à ce que quelqu’un l’abatte où qu’elle parvienne à s’enfuir.

Mon pire cauchemar était devenu réalité. C’était pour ça que je m’étais enfermée pour ne plus jamais sortir. C’était tout ce dont j’avais toujours eu peur.

Attendez ! Elle m’avait entendu ! C’était comme ça qu’elle avait su qu’il fallait s’attaquer à la poignée. Si elle m’a entendu dire ça, alors…

« Stop ! Tu ne vas pas attaquer mon amie. Tu ne lui feras pas ce que tu as fait à ma mère ! »

Comme si elle était brusquement paralysée, elle s’est arrêtée. Immobile, la tristesse envahit mon esprit. Ce n’était pas moi qui la ressentais, c’était la louve. Elle pensait à ce qu’elle avait fait à ma mère. Les regrets l’envahissaient. Étonnamment, elle savait que cela avait été involontaire. Et, comme si elle avait été calmée par la tragédie, elle s’est lentement éloignée de la porte en gémissant.

Ma louve pleurait. Elle savait ce qu’elle avait perdu quelque chose d’au moins aussi important pour elle que pour moi ce jour-là. Elle savait aussi que c’était de sa faute. Nous avions tous les deux grandi sans mère à cause de ça. Ma louve n’avait pas voulu tuer. Elle avait simplement agi de façon impulsive et des choses inattendues s’étaient produites.

Sans lui demander de le faire, la louve s’est approchée de mon miroir de plain-pied. Il faisait sombre, mais les yeux du loup y étaient bien plus habitués que les miens. Je parvenais clairement à voir son reflet. J’avais 20 ans et étais à peine adulte. La louve me regardant dans le reflet était bien plus vieille que ça.

Je ne l’avais vu qu’en vidéo auparavant. À l’époque, c’était une louve bien plus jeune. Celle-ci semblait plus calme et même un peu plus sage que celle qui faisait des allers-retours dans la chambre de sécurité de mon père. Était-elle différente de celle qui avait terrorisé mon monde il y a toutes ces années  ?

Peut-être était-ce le cas. Peut-être ne connaissait-elle pas du tout cette louve. Peut-être que je ne la connaissais pas moi-même. Qui serais-je si je n’avais pas peur à ce point de ce que je pourrais devenir ?

 

 

Chapitre 2

Cage

 

Waouh ! Je n’ai jamais rien ressenti de pareil de toute ma vie. Lorsque je regardais Quin, je pouvais à peine me retenir. Je n’arrivais pas à ne pas poser mes mains sur elle. J’aurais pu rester à la soirée avec elle toute la nuit. Pour la première fois depuis longtemps, je me sentais vivant.

Revenir à la réalité avait été une pilule difficile à avaler. Lorsque j’avais reçu le message de Tasha, j’avais eu l’impression que l’on me tirait le tapis sous les pieds. Je voulais rester là avec Quin. Je voulais voir jusqu’où les choses iraient. Mais j’avais promis à Tasha que je l’emmènerais diner que nous gagnions le match ou non. Je tenais toujours mes promesses et j’en avais fait une à Tasha.

« Alors, je voulais te parler de quelque chose, » dit Tasha, rompant le silence alors que nous marchions.

« Quoi donc ? »

Tasha me regarda avec un air excité et rougit. La voir exprimer des émotions était inhabituel. Généralement, un nuage noir la suivait, infectant tous ceux à proximité.

Je devais en déduire qu’elle n’était pas heureuse dans sa vie. Je faisais clairement partie des choses qui ne la satisfaisaient pas. Mais dès que je tentais de lui en parler, elle m’accusait de tenter de gâcher ce que nous avions de bien tous les deux.

Qu’était-ce ? Elle n’était pas heureuse. Je n’étais pas heureux. Et notre vie sexuelle était quasi-inexistante.

« Tu connais Vi, pas vrai ? » Demanda Tasha, pleine d’entrain.

« Ta meilleure amie, Vi ? Avec qui tu passes tout ton temps ? Ouais, je la connais. »

« Tu n’es pas obligé de le dire comme ça. »

« Tu m’as demandé si je connaissais la fille donc tu parles tout le temps. »

« Est-ce que tu tentes de lancer une dispute ? J’essaie de faire quelque chose de gentil pour toi. »

Je me suis repris et ai pris une longue inspiration. Je n’étais pas sympa à l’instant. Je pouvais le voir. Je ne voulais pas laisser Quin, mais j’avais dû le faire à cause de Tasha. Ça valait probablement mieux, ceci dit, parce que ce qu’elle me faisait ressentir ne pouvait que me pousser à prendre des décisions que je regretterais plus tard.

J’avais des choses plus importantes à gérer. J’avais travaillé toute ma vie pour entrer dans la NFL. Être avec une fille comme Tasha aidait à vendre l’image de moi comme le futur visage de la franchise. Du moins, c’est ce que dit mon père. Et le fait de devenir joueur professionnel avait été son rêve bien avant d’être le mien. Je ne pouvais pas le décevoir.

« Je suis désolé. Je suppose que je suis encore un peu endolori à cause du match. Ça me rend un peu grognon. »

Tasha sourit. « Tu es pardonné, » dit-elle en passant ses bras autour du mien. « Et je pense que j’ai quelque chose qui t’aidera à te sentir mieux. »

« D’accord, » ai-je dit en forçant un sourire. « Qu’est-ce que c’est ? »

« Eh bien, tu te souviens quand nous avons parlé d’épicer les choses… Dans la chambre ? »

J’ai lancé un regard suspicieux à Tasha. Épicer les choses était une idée à elle et lorsqu’elle l’avait proposé, j’avais eu l’impression qu’elle avait quelque chose de très spécifique en tête dont elle ne voulait pas parler.

« Je m’en souviens. »

« Donc, j’ai parlé à Vi… »

« D’accord, » ai-je dit, perplexe.

« J’ai parlé à Vi et je lui ai demandé si ça l’intéressait de se joindre à nous quand nous serions… Ensemble. Et elle a dit oui, » dit Tasha en gloussant.

J’ai arrêté de marcher et l’ai regardé. Il me fallut une seconde pour appréhender ce qu’elle disait.

« Tu veux dire, comme un ménage à trois ? »

« Ouais, » dit-elle en devenant rouge vif.

« Tasha, pourquoi est-ce que tu as fait une chose pareille ? »

« Que veux-tu dire ? »

« Pourquoi veux-tu inviter quelqu’un d’autre dans notre lit… Et sans même m’en parler avant ? »

« Je me suis dit que ça te plairait. Est-ce que tous les hommes ne veulent pas être avec deux belles femmes à la fois ? »

« Pas tous. Et si tu m’avais posé la question, je t’aurais dit que je suis du type ‘un homme une femme’… Si tu m’avais posé la question. »

« J’ai cru que ça te plairait, » dit-elle, le cœur brisé.

« Eh bien, ce n’est pas le cas. Et, je ne sais pas pourquoi tu as suggéré une chose pareille. »

« Peut-être parce que nous ne couchons plus ensemble. »

« Et c’est de ma faute ? C’est toi qui passes tout ton temps avec Vi. »

« Qu’est-ce que tu essaies de dire ? »

« Je dis que ce n’est pas moi qui ne veux pas coucher avec l’autre. »

« Et bien pourtant, c’est à s’y méprendre. »

« Alors, si tu es si malheureuse, peut-être que nous ne devrions pas rester ensemble. »

Tasha resta paralysée à me regarder. « Pourquoi est-ce que tu dis une chose pareille ? »

« Ce n’est pas évident ? »

« Non. Nous sommes faits l’un pour l’autre. Je serais une épouse parfaite. Tu le sais. Tu vas être sélectionné et deviendras le quarterback titulaire d’une grande équipe de la NFL et je m’occuperais de la maison et m’occuperais d’une organisation caritative. Nous en avons parlé, bébé. Nos futurs sont décidés. »

Elle avait raison. Nous en avions parlé et c’était exactement ce que nous avions dit. Mais à présent que j’étais en dernière année et que je ne pouvais plus repousser mon entrée dans la draft, je commençais à avoir des doutes. Ce n’était pas de sa faute, ceci dit. Et je ne devrais pas me défouler sur elle.

« Tu as raison, je suis désolé, Tasha. Je suis juste de mauvaise humeur aujourd’hui. Mais je t’en prie, plus de discussions… à propos de plans à trois, d’accord ? »

Dès que je l’eus dit, je vis la lumière dans les yeux de Tasha disparaitre.

« D’accord, » accepta-t-elle alors que nous avons continué à avancer vers le restaurant en silence.

 

« Je t’avais dit de ne pas suivre ce cours, Rucker. »

« Coach, c’était quelque chose qui m’intéressait, » ai-je tenté d’expliquer pour la millième fois.

« Introduction à l’Éducation Infantile ? Qu’est-ce que le Quarterback titulaire des Cowboys de Dallas ou des L.A Rams peut faire d’un cours sur l’éducation infantile ? » Me demanda mon entraineur, plus qu’un peu énervé.

« Écoutez, » ai-je dit, perdant enfin patience. « J’ai suivi tous les cours que vous m’avez dit de suivre, que ça me plaise ou non. J’ai assisté à chaque entrainement que vous avez prévu et je m’entraine à en vomir… »

« Et regarde où tu en es grâce à ça. Une recrue de choix dans une draft compétitive. Tu devrais me remercier de t’avoir poussé à ce point. »

Je me suis repris et ai pris une longue inspiration. « Et c’est le cas. Mais Coach, il faut que je suive au moins un cours qui me plaise. »

« Mais pourquoi celui-là ? »

« C’est ce qui m’intéresse. »

« Et pourtant tu n’as pas assisté à un seul cours depuis le début de l’année. »

« C’est parce qu’il commence 20 minutes après la fin de l’entrainement. Je pensais pouvoir courir y assister quand il serait fini, mais parfois les entrainements se finissent tard ou il faut que je prenne un bain de glace. Parfois, je suis juste trop fatigué. »

« Eh bien, tu aurais dû penser à ça avant de choisir ce cours parce que ce professeur n’est pas aussi indulgent envers les étudiants-athlètes que les autres. Celui-là pense que tu aurais dû assister aux cours et passer les contrôles pour réussir. Et si tu rates ce partiel, tu ne serais pas autorisé à jouer au printemps. Ça signifie que ton équipe ne gagnera pas et que personne ne te repèrera. »

« J’ai compris. Je vais assister aux cours. »

« Pas seulement. Tu vas prendre un tuteur. Je vais demander à des gens de confiance de te trouver quelqu’un. Quand est ton prochain cours ? »

J’ai regardé l’horloge accrochée au mur de l’entraineur.

« Maintenant. »

« Alors, ramène ton cul là-bas. »

« Coach, c’est à l’autre bout du campus. Lorsque j’arriverai là-bas, il ne restera que cinq minutes. »

« Je suppose que ça signifie que tu vas devoir courir, pas vrai ? »

« Coach, nous venons tout juste de faire 20 minutes de sprints. »

« Ne parle pas, cours. Je suis sérieux. Allez, allez, allez ! »

Une fois sorti du bureau, j’ai fait ce que l’on m’a dit et ai commencé à courir. J’avais enlevé ma protection de torse, mais étais toujours en crampons, maillot et pantalon renforcé. Le cours était au troisième étage d’un bâtiment à l’autre bout du campus. Je n’avais pas le temps de me changer si je voulais pouvoir y arriver.

Je ne savais pas comment je m’étais mis dans cette situation. En fait si. C’était mon acte de rébellion. Ouais, je savais que cela entrerait en conflit avec les horaires d’entrainement, mais je pensais que cela me donnerait une excuse pour partir plus tôt. J’avais tort. Et à présent, mon futur, tout entier était en jeu.

Après être entré dans le bâtiment et avoir monté les escaliers, j’étais complètement à bout de souffle. Par chance, personne ne pouvait entendre ma respiration à cause du bruit terrible de mes crampons résonnant sur le béton. Je ne pourrais pas me faufiler discrètement au fond de la classe. Lorsque j’eus ouvert la porte, tout le monde était déjà tourné pour regarder. Il y avait 50 élèves et un professeur en colère et tous me fixaient des yeux.

« Désolé ! Continuez, s’il vous plait, » ai-je dit, luttant pour reprendre mon souffle et digérer l’humiliation.

Je me suis assis dans le premier siège libre que j’ai trouvé et ai réalisé que j’avais laissé mon livre de cours dans mon casier. Ce n’était pas comme si j’avais eu le livre d’exercice de cette matière de toute façon. J’avais oublié l’idée d’assister à cette classe il y a bien longtemps. Mais il aurait été sympa d’avoir quelque chose devant moi pour que je n’aie pas l’air d’un idiot.

J’ai sorti mon téléphone et ai fait de mon mieux pour donner l’impression que je prenais des notes dessus. Ce n’était pas le cas, car je n’avais aucune idée de ce dont le professeur pouvait parler. Il semblait que ce soit clair pour tous les autres ceci dit. Ils étaient tous parfaitement concentrés sur la femme se trouvant devant nous. En fait, tout le monde suivait à l’exception d’une personne. Et lorsque je vis de qui il s’agissait, j’en eus le souffle coupé.

C’était Quin, et elle regardait dans ma direction. Nos regards se croisèrent pendant une seconde puis elle tourna la tête. Tout en moi se mit à trembler. Je pus immédiatement sentir que je respirais plus difficilement.

Rien que la voir me faisait quelque chose. Je venais de recevoir une deuxième chance avec elle. Je n’allais pas la laisser disparaitre hors de ma vie une nouvelle fois.

« Et j’en ai fini. Lors du prochain cours, nous aurons un contrôle sur ce que nous avons étudié lors de des deux dernières semaines, » dit le professeur avant de concentrer son attention sur moi. « M. Rucker, est-ce que je peux vous parler une minute ? »

Je ne m’attendais pas à ça. Pire encore, Quin était assise de l’autre côté de la salle, qui donnait sur une autre sortie. Elle ne regardait pas dans ma direction et elle serait partie avant que je puisse lui dire de m’attendre.

« M. Rucker, » appela à nouveau la femme asiatique aux cheveux gris.

« J’arrive, » lui dis-je en gardant un œil sur Quin alors qu’elle se rapprochait de la sorte.

Nageant rapidement à contrecourant de la marée de personne, je me suis approché du professeur alors qu’elle effaçait le tableau. Elle prenait son temps ce qui me tuait à petit feu. Lorsque Quin disparut dans l’entrebâillement de la porte, mon cœur se déchira. Elle était à nouveau partie et je me sentais comme une merde.

« Arriver cinq minutes avant la fin n’est pas considéré comme assister à mon cours. Du moins pas pour moi. »

« Je sais. Et je suis vraiment désolé pour ça. J’ai couru ici après l’entrainement, mais je vous promets que je ne serais plus en retard à l’avenir. »

« On m’a indiqué que vous devez réussir ce cours pour rester éligible afin de jouer le reste de la saison.

« C’est exact, madame. »

« Dans ce cas, on pourrait croire que vous suivriez ce cours plus au sérieux. »

« Et je promets que ça sera le cas… À l’avenir. »

« Si vous ne voulez pas être là… »

« Si, je veux être là. »

« Pourquoi ? » Demanda-t-elle d’un ton sincère.

« Parce que c’est un sujet qui m’intéresse vraiment. Enseigner aux enfants est quelque chose que j’ai toujours voulu faire. »

« Et le football ? J’ai cru comprendre que vous aviez une carrière prometteuse. »

« Le football est ce pour quoi je suis doué. C’est une bénédiction. Mais ce n’est pas… »

Je n’ai pas fini ma phrase. Les ramifications étaient trop importantes pour que je puisse réellement les saisir là, maintenant.

« Et bien si vous êtes vraiment sérieux dans votre volonté de suivre ce cours, vous avez beaucoup de retard à rattraper. »

« Je le sais, et je suis prêt à travailler. Je vais avoir un tuteur. »

« Vraiment ? »

« Oui, madame. En fait… » Ai-je dit, ayant brusquement une idée. « Est-ce que nous pourrions reprendre cette discussion lors du prochain cours ? Je vous promets d’être à l’heure. »

« Il vaudrait mieux. Souvenez-vous qu’assister à mes cours est obligatoire. »

« Compris. Je suis dessus. Je serais là. Promis, » ai-je dit en faisant claquer mes crampons sur le tapis alors que je trottais en direction de la porte.

Dès que j’ai été dans le hall, j’ai regardé des deux côtés pour le trouver. Elle n’était pas là. Où avait-elle pu aller si vite ?

La plupart des élèves se dirigeaient vers les escaliers menant plus bas. J’ai trotté dans leur direction et les ai rejoints. J’ai levé la tête, je ne parvenais pas à la voir. J’étais sur le point de me mettre à me détester pour ne pas être sorti plus tôt lorsque je vis le dos d’une personne ne pouvant être que Quin s’éloigner des escaliers en direction du niveau principal.

« Pardon, pardon, » dis-je, en me glissant devant tout le monde.

Cela ne me permit d’arriver que quelques secondes plus vite et une fois que je fus là-bas, elle était à nouveau hors de vue.

J’ai regardé dans toutes les classes devant lesquelles je suis passé en courant, mais je ne l’ai pas vue. J’étais sur le point d’abandonner espoir lorsque j’ai ouvert la porte du bâtiment et l’ai vu sa silhouette sexy s’éloigner. Une vague de chaleur me traversa. J’avais l’impression de voir un rayon de soleil lors d’une journée couverte de nuages.

J’ai trotté dans sa direction et ai ralenti lorsque je n’ai été qu’à un mètre. Je ne pouvais pas perdre mon calme juste parce que j’étais sur le point de parler à la plus belle femme que j’avais jamais vue. Je devais au moins faire comme si l’embrasser n’était pas la seule chose à laquelle j’avais pu penser depuis le moment de notre rencontre.

« Quin ? » Ai-je dit de mon ton le plus détendu possible.

Elle s’est arrêtée et s’est tournée. Elle n’avait pas l’air aussi contente de me voir que je ne l’étais de la voir. Cela me fit mal au cœur, mais j’ai décidé de l’ignorer.

« Je me suis dit que c’était toi. Comment vas-tu ? Tu es allé à de grosses soirées depuis la dernière fois que je t’ai vue ? » Ai-je dit avec un sourire.

Puisqu’elle ne répondait pas, j’ai dit, « Cage. Cage Rucker. Nous nous sommes rencontrés la soirée Sigma Chi. »

« Je m’en souviens, » dit-elle, toujours pas contente de me voir. Ouille ! La douleur revenait. « Comment va Tasha ? C’est bien le nom de ta petite amie, pas vrai ? »

« Tasha ? Oh, ouais. Elle va bien. Tout roule. Ah, est-ce que j’ai fait quelque chose pour te foutre en rogne ? Si c’est le cas, je suis désolé, » ai-je dit, voulant désespérément la voir sourire à nouveau.

Quin me regarda avec un air frustré avant de céder.

« Non. Tu n’as rien fait de mal. Ne t’occupe pas de moi. J’ai juste passé une sale nuit. »

« Tu n’as pas bien dormi ? »

« Quelque chose dans le genre. Ou peut-être que je suis juste idiote, je ne sais pas. »

« Toi ? Idiote ? J’ai du mal à y croire, » ai-je dit avec un sourire.

Elle me regarda à nouveau. Cette fois-ci, elle semblait chercher à inspecter mon âme.

« Pourquoi dis-tu ça ? »

« Je ne sais pas. Je suppose que tu me donnes l’impression d’être quelqu’un de très intelligent. »

Son regard s’adoucit un peu.

« Je ne suis pas intelligente pour quoi que ce soit d’important, » dit-elle avant de reprendre sa marche.

Je l’ai rattrapée.

« Je ne crois pas que ce soit vrai. En fait, je parie que tu es très douée en Introduction à l’Enseignement Infantile. Je parie que tu es la première de la classe. »

Quin me regarda pendant que je disais ça.

« C’est le cas, pas vrai ? »

Elle tourna la tête.

« Je n’y crois pas. D’accord. Alors ça va rendre la prochaine chose que je vais dire moins gênante. Il s’avère que j’ai besoin de ce cours pour rester éligible pour le football et, ensuite, la draft de la NFL. Et puisque je n’ai pas assisté aux cours, je suis un peu en retard. J’ai en quelque sorte besoin d’un tuteur. Le programme de football est prêt à te dédommager pour ton temps. »

« Je ne peux pas être ta tutrice, » dit-elle, écartant l’idée.

« Pourquoi pas ? »

« Je ne peux juste pas. Désolée. »

« D’accord. Et si je faisais en sorte de rendre les choses plus intéressantes ? »

« Que veux-tu dire ? »

« Lorsque nous étions à la soirée, tu as dit que tu n’étais pas très douée pour ce qui était de se sociabiliser, ce que je ne comprends pas puisque tu semblais parfaitement à l’aise. »

« Je n’étais à l’aise que grâce à… »

« Grâce à quoi ? » Ai-je demandé, espérant qu’elle dise que ça ait été à cause de moi.

« Rien. »

« Eh bien, si tu es prête à devenir ma tutrice dans ce pour quoi tu es doué, je peux te servir de tuteur dans ce pour quoi je suis doué. »

« Tu veux dire être une star du foot dont tout le monde veut un morceau ? »

« Alors d’abord, ouille. Ensuite, je suis un peu plus que ça. »

« Je sais. Je suis désolé. Tu vois, je suis nulle pour ça, » s’exclama Quin.

J’ai pris sa main le plus calmement possible. J’ai tenté de faire comme si c’était juste quelque chose que je faisais lorsque je parlais aux gens, mais la vérité était que je mourrais d’envie de lui tenir la main.

« Tu es bonne pour ces choses. Du moins, tu peux l’être. Laisse-moi t’aider. Je sais que je peux le faire. Et une fois que j’en aurais fini, tu seras la joueuse-star de l’équipe de foot dont tout le monde veut un morceau, comme moi, » ai-je dit avec un sourire.

Quin éclata de rire. Ça me titillait tellement que j’ai cru mes dents allaient en tomber.

« Alors, qu’en dis-tu ? »

Quin me regarda tout en y réfléchissant. Alors qu’elle le faisait, quelque chose d’étrange se produisit. J’ai senti ses yeux gagner en profondeur puis me transpercer.

J’avais l’impression qu’elle fouillait mon âme. Alors qu’elle le faisait, quelque chose s’alluma en moi. Je ne pouvais pas expliquer ce qui se passait.

Le ressentait-elle aussi ? Que me faisait-elle ? Que se passait-il entre nous ? Quoi que ce soit, cela me coupa le souffle.

Lorsqu’elle finit par enfin cesser de me regarder, j’ai pris une inspiration désespérée. Elle retira sa main de la mienne. Elle ne fit pas ça de façon subtile. Mon cerveau tourbillonnait encore, mais je pense qu’elle tentait d’envoyer un message à propos des limites à respecter. Très bien, je pouvais respecter ça.

« D’accord, » dit Quin avec un air émerveillé dans le regard.

« D’accord ? » Ai-je répété alors que je tentais encore de récupérer.

« D’accord, » confirma-t-elle avec un sourire grandissant.

« J’ai cru comprendre qu’il y allait avoir un contrôle dans les jours qui viennent, » ai-je dit, reprenant mes esprits.

« C’est dans deux jours et ce sera sur deux semaines de leçon. »

« Ça donne l’impression d’être beaucoup. »

« Ça l’est, » confirma-t-elle.

« On dirait que ton tutorat devrait commencer immédiatement, » ai-je suggéré, voulant brusquement passer chaque minute de chaque jour avec elle.

« Et pourquoi pas ce soir ? Je vais mettre en place un plan de cours et nous partirons de là. »

« Un plan de cours ? Tu ne rigoles pas. »

« Non. Et il vaudrait mieux que toi non plus si tu veux réussir le partiel. »

« Je ne prendrais pas ça à la légère. »

Quin hésita. « Et tu n’as pas de projets avec ta petite-amie ou quoi que ce soit, pas vrai ? »

Être rappelé de Tasha était comme recevoir un seau d’eau glacé sur mon excitation naissante à l’idée de passer la soirée avec Quin. Mon sourire diminua un peu.

« Même si j’avais quelque chose de prévu, j’annulerais. Réussir ce cours et jouer au football passent en premier. Elle comprendra. »

« D’accord. Alors dans ce cas, je te verrais ce soir. »

« Est-ce que je devrais prendre ton numéro ? » Lui ai-je demandé, ne ratant pas mon opportunité cette fois.

« Oui, donne-moi ton téléphone. »

Je lui ai tendu et elle l’a composé. Une seconde plus tard, j’ai entendu un téléphone sonner dans son sac.

« Tu sais où je vis. Je t’enverrais mon numéro de chambre et l’heure, » dit Quin d’un ton professionnel.

« Donc nous ferons ça chez toi ? »

« À moins que tu aies une meilleure idée. Je suppose que nous pourrions aller dans une bibliothèque, mais je ne sais pas à quel point ils nous laisseront parler. »

« Non, chez toi c’est super. Je suis impatient d’y être. »

« Tu es impatient d’étudier ? » Me demanda-t-elle, me rappelant que ce n’était pas un rencard.

« Évidemment. L’Introduction à l’Éducation Infantile est ma raison de vivre. Demande à n’importe qui. »

Quin rit. Cela fit fondre mon cœur.

« On se voit plus tard alors, Fossettes, » dit-elle avec un sourire avec de se tourner et de s’éloigner. La vache, j’étais vraiment dans la mélasse.

 

 

Chapitre 3

Quin

 

« On se voit plus tard, Fossettes ? Est-ce que j’avais vraiment dit ça ? À quoi est-ce que je pensais ? À quoi est-ce que je pensais en acceptant de faire quoi que ce soit ? »

Dire que la nuit précédente avait été compliquée était l’euphémisme de l’année. J’étais restée piégée, impuissante, dans mon corps de louve pendant des heures. Cela ne s’était terminé que lorsque nous nous étions toutes les deux endormies.

Au matin, je n’étais pas couverte de sang ni ne m’étais réveillée dans un endroit inconnu. J’étais dans ma chambre, sur mon lit. Ouais, la porte était couverte de traces de griffes, mais elle n’avait pas été ouverte même s’il était évident que ma louve avait été toute proche de sortir.

Si elle avait fait une tentative supplémentaire, cela aurait suffi. Elle se serait libérée et qui sait ce qui se serait passé après ça. Mais ça n’avait pas été le cas. Elle n’avait pas fait cette dernière tentative.

Au-delà de ça, j’avais passé la matinée avec la sensation qu’elle n’était pas complètement partie. J’avais l’impression qu’elle flottait au-dessus de mon cœur à observer tout ce que je faisais. C’était elle qui m’avait dit que Lou était partie au milieu de la nuit. Elle pouvait même me dire à quelle heure elle l’avait fait. Je ne savais pas comment, mais ma louve savait.

En voyant Cage entrer dans la salle de classe, j’avais eu le sentiment de sentir ses oreilles se dresser. Elle semblait aimer Cage encore plus que moi.

Je n’étais pas esclave de ses sentiments cependant. Et j’étais celle à qui l’on avait présenté la petite-amie de Cage, pas elle. Donc jamais je n’allais me laisser entrainer dans cette direction, en particulier après ce que sa petite-amie et lui avaient fait ressortir en moi.

J’étais prête à m’éloigner de Cage et ne plus jamais le revoir. Puis il m’avait retrouvé et avait fait cette proposition. La raison pour laquelle j’avais dit oui n’avait rien à voir avec ce que ma louve voulait. Ça n’avait rien à voir non plus avec l’étrange connexion que je ressentais avec lui lorsque je le regardais dans les yeux.

J’avais accepté sa proposition parce que Harlequin Toro était venue au milieu de nulle part dans le Tennessee dans un seul but, découvrir comment avoir une vie. D’accord, je ne pouvais pas en avoir une avec Cage, mais lorsque j’avais été à la soirée avec lui, je m’étais sentie plus détendue dans une situation sociale que je ne l’avais été n’importe quand avant dans ma vie.

J’avais besoin de savoir ce que je ressentais seule. Et, lorsque je le regardais dans les yeux, quelque chose me disait qu’il pouvait le faire sortir de moi. Comment pouvais-je savoir ça ? Je l’ignorais. Mais j’en étais certaine.

Se pouvait-il que ma louve joue avec mon esprit dans un but abominable ? Cela restait une possibilité — je venais tout juste de la rencontrer. Elle était quelque chose dont je n’avais qu’entendu des histoires auparavant—mais, je ne pensais pas que ce soit le cas. Il se passait quelque chose d’autre avec Cage. Je ne parvenais pas à commencer à deviner ce dont il pouvait s’agir.

Quoi que ce soit, cela me poussait vers lui. Ce n’était pas juste parce qu’il était beau à tomber — non pas que j’ai brusquement dépassé ça, il restait un dieu vivant — mais… Je ne savais pas.

Il y avait plus que ça et je ne parvenais pas à mettre le doigt dessus. Cela me disait d’accepter son offre. Et, lorsque je l’ai fait, ma louve était devenue folle. Pas d’une façon dangereuse, mais qui m’a fait sourire.

« Lou, tu es revenue ? Ai-je dit en rentrant dans notre appartement et la voyant, l’air crevé.

« Je n’aurais pas dû ? »

Elle était assise à notre table à manger, terrifiée, mais tentant d’avoir l’air courageuse. La tristesse m’envahit en voyant à quel point je lui avais fait peur. Pour la première fois, j’avais pu voir à quoi ressemblait ma louve lorsqu’elle tentait de s’en prendre à quelqu’un. C’était horrible.

Si j’avais été celle qui avait entendu les griffes racler contre la porte alors que la bête tentait de s’en prendre à moi, je ne serais probablement jamais revenue. Et pourtant, elle était là. Pourquoi était-elle revenue ? Pourquoi est-ce que qui que ce soit reviendrait après avoir vu cet aspect de moi ?

« Non, tu devrais être là. C’est ici que tu vis… Devrais-je partir ? Ai-je demandé, me rendant compte qu’elle était peut-être simplement revenue pour réclamer l’appartement pour elle.

« Si tu devrais partir ? »

« Je ne sais pas ? Devrais-je ? »

« D’accord. Je pense que nous n’allons nulle part là, » dit-elle, gérant ça bien mieux que je n’aurais pu le faire. « Écoute, je sais que tu m’as parlé de ton problème. Mais tu as dit que tu n’avais pas eu de crise depuis des années. Tu disais que c’était passé. »

« Je pensais que c’était le cas, » dis-je en m’asseyant dans une chaise face à elle.

« Alors qu’est-ce que c’était que ça ? »

« Je ne sais pas. »

« Est-ce que c’est arrivé à cause de la pleine lune ? »

J’ai entendu ma louve gronder devant sa suggestion. « Non ! » Avais-je craqué ? Dès que je l’eus dit, mon esprit vagabonda en y repensant. « Du moins, je ne crois pas. »

« Parce que tu vis ici depuis des mois et ce n’était pas la première pleine lune. »

« En effet, ça ne l’était pas, si ? »

« Alors quelle était la différence cette fois ? » Demanda Lou comme si elle s’inquiétait pour moi plutôt que sa propre sécurité.

J’ai réfléchi à sa question. Quelle avait été la différence ? Je ne pouvais pas en être sure, mais j’avais une idée. J’ai sorti mon téléphone de mon sac et ai ressorti la photo de la nuit dernière. Je l’ai posé sur la table entre nous.

« Qui est ce type ? »

« Il s’appelle Cage. Je l’ai rencontré à la soirée à laquelle je suis allée. »

« Pourquoi est-ce que tu as l’air si… dévastée ? »

« Parce que sa petite amie a pris la photo. »

Lou leva les yeux pour croiser mon regard.

« Oh. Je suis vraiment désolée, Quin. C’est moi qui ai causé ça, pas vrai ? Je t’ai manipulée pour que tu ailles à cette soirée et tu as fini avec le cœur brisé et… tu as rechuté. »

« Rien de tout ça n’était ta faute. Et même si c’était le cas, il ne s’est rien passé. Personne n’a été blessé. »

« Mais si, quelqu’un a été blessé Quin, toi. »

Je ne savais pas quoi répondre à ça. Je voulais le nier, mais c’était vrai. Était-ce pour ça que je m’étais transformée ? Était-elle sortie pour me protéger ? Et, si c’était le cas, qu’aurait-elle fait une fois libérée ? Je ne voulais pas y penser.

« Tu ne peux pas être là ce soir. »

Les doigts de Lou se resserrèrent autour de son verre de peur. « Ça va recommencer ? »

« Non ! Du moins je ne crois pas. Non. Mais j’ai invité quelqu’un à venir. »

« Qui ? »

« Cage. »

Lou resta bouche-bée, complètement perdue.

« Juste pour réviser. Je lui fais du tutorat pour un cours que nous avons en commun. »

« Tu as un cours en commun avec lui ? »

« Apparemment, il est venu pour la première fois aujourd’hui. Il portait son équipement de football, » ai-je dit incapable d’empêcher un sourire d’apparaitre sur mon visage.

« Tu parles des trucs tout serrés que portent les joueurs de foot ? »

« Ah-euh, » ai-je dit, sentant mon visage se réchauffer.

« Oh ! Il ne vient pas juste pour réviser, pas vrai ? »

« Si, si, » dis-je, redevenant rationnelle. « Il doit réussir l’examen pour jouer au football le prochain semestre donc il m’a demandé de lui servir de tutrice. »

« Donc tu tiens sa vie entre tes mains puissantes, mais délicates ? »

J’ai baissé le regard en direction de mes mains me demandant ce qu’elle pouvait vouloir dire.

« Je veux dire, pas vraiment. Mais peut-être en quelque sorte. »

« Oh, mon Dieu, vous allez vous embrasser tous les deux. »

« Quoi ? Non. » Lorsque je me suis entendue le dire, j’ai senti ma louve saliver à l’idée. « Non ! Il a une petite amie, » ai-je dit pour que les choses soient claires pour tous ceux qui écoutaient.

« Peut-être qu’il veut que tu te joignes à eux deux ? »

« Ah, non, » ai-je dit d’un ton ferme.

« Donc nous allons les faire rompre ? » Demanda Lou alors qu’un air malicieux revenait dans son regard.

« Non, absolument pas. »

« Tu ne vas pas la manger, pas vrai ? » Demanda-t-elle d’un ton hésitant.

« Non ! Non à tout ce que tu viens de dire. Si elle est la personne avec qui il veut être, alors… très bien. Ça me va. »

« À quel point est-ce que ça t’a fait mal de dire ça ? » Dit-elle, me regardant soudainement avec sympathie.

J’ai pris un moment pour digérer ce qu’elle venait de dire. « Très mal. Mais ça va devoir être vrai. Je ne veux pas être avec quelqu’un qui ne veut pas être avec moi. »

« Tu es une meilleure personne que moi, » dit Lou en laissant tomber.

« Je ne sais pas si je suis meilleure, mais je suis beaucoup plus seule. »

« Ahhh ! » Dit Lou me regardant avec une empathie sincère. Au bout d’un moment, elle se leva, fit le tour de la table et m’enlaça. Gardant les bras autour de moi, elle dit, « Ce garçon va causer notre perte à tous, pas vrai ? »

« Probablement. »

« Eh bien, lorsque la chose de la nuit dernière, quoi que ce soit, me réduira en pulpe, promets-moi juste une chose, » demanda Lou d’un ton détendu.

« Quoi donc ? »

« Pas le visage, Bouton d’or, pas le visage. »

J’ai ri, me sentant bien mieux.

 

 

Chapitre 4

Cage

 

Je peux y arriver. Je peux passer un peu de temps avec Quin, ne pas tomber fou amoureux d’elle et ne pas foutre toute ma vie en l’air pour être avec elle. Je suis sûr que je peux y arriver. Ceci dit, plus l’heure de notre rencontre s’est approchée, plus il devint clair que je n’aurais pas mon mot à dire dans cette histoire.

Comment se faisait-il que tous les garçons ne voyaient pas tout ce que moi je pouvais voir en elle et me la voler sous le nez ? Je ne comprenais pas. Cette fille était magnifique et d’une maladresse adorable. Je pourrais passer mes doigts dans ses cheveux noirs et bouclés jusqu’à m’y perdre.

Oh, et ses yeux. Ne me lancez pas à propos de ses yeux, ces yeux électrifiant et pleins de vie. Rien que d’y penser, j’en étais dur. Comment pouvait-elle me faire ça ?

C’était comme si… quelle est cette chose qu’utilisent les animaux pour attirer un partenaire ? Des phéromones ? C’est comme si elle relâchait des phéromones et qu’il m’était impossible de leur résister.

Je n’aurais vraiment pas dû lui demander de me donner des cours. Elle était probablement la seule personne à laquelle je n’aurais pas dû demander. Comment allais-je pouvoir réussir à me concentrer avec ses bras à portée des miens ? C’était définitivement une erreur. Mais je n’en pouvais plus d’attendre et le temps ne m’avait jamais paru s’écouler aussi lentement de ma vie.

J’ai attendu dans la salle commune qu’il soit l’heure de nous revoir au lieu de rentrer à la maison et de revenir. Passer voir Tasha aurait aussi pu être une option puisqu’elle habitait à l’étage au-dessus du sien. Mais il y avait de fortes chances qu’elle soit en train de trainer avec Vi.

Elles étaient inséparables toutes les deux. Il n’était pas étonnant qu’elle ait suggéré que Vi couche avec nous. Elles faisaient tout le reste ensemble. Pourquoi pas ça aussi ?

Une fois que la longue attente insupportable avant d’aller la voir fut terminée, je me suis dépêché de traverser la cour. Je suis entré dans le bâtiment alors que quelqu’un en sortait et ai grimpé les escaliers deux marches à la fois avant de frapper à sa porte. J’ai entendu un peu de bruit à l’intérieur avant qu’une voix inconnue ne dise, « Je veux juste le voir, » et que la porte s’ouvre.

« Bonjour, » ai-je dit alors qu’une femme à l’air taquin se trouvait devant moi.

« Lou, contente de faire ta connaissance, » dit-elle sans me tendre la main ni me faire entrer à l’intérieur.

« Cage. »

« La star du foot ? » Dit Lou avec un sourire.

« Je suppose. Est-ce que Quin est là ? »

« En effet. Mais d’abord, deux questions. Quelles sont tes intentions vis-à-vis de mon amie ? Et tu te considèrerais comme un fan de chiens ou de chats ? »

« Quoi ? »

« Lou ! »  Cria Quin dans son dos. Il passa devant Lou et mit son corps entre nous deux, avant de dire, « Désolée pour ça. Elle était sur le point de partir. »

Le corps de Quin était tellement proche du mien.

« Ce n’est rien. Lou, je t’inviterais bien à rester et à trainer avec nous, mais nous avons l’équivalent de deux semaines de cours à rattraper… À moins que Quin ne pense que nous puissions faire les deux ? »

« Nous ne pouvons pas faire les deux et Lou était sur le point de partir. Au revoir, Lou. »

 « Tchuss, » dit Lou en passant devant moi et en laissant Quin m’inviter à entrer.

« Je suis désolé pour ça. Lou a bon fond. »

« Il est toujours bon d’avoir une amie qui veille sur soi. »

« En effet. Sinon, bienvenue dans ma chambre. »

J’ai regardé autour de moi. « C’est comme ça que vit l’autre moitié ? »

« Que veux-tu dire ? »

« Les dortoirs de Plaza sont assez chics. »

« Est-ce que ta petite-amie ne vit pas ici aussi ? »

« Ouais, mais ça ne rend pas l’endroit moins chic. En plus, elle a deux colocataires et doit partager une chambre. Ton appartement est mieux décoré que ma maison. »

« Tu vis dans une fraternité ? »

« Non. Je ne suis pas membre. Je sais, un joueur de foot qui n’est pas membre de Sigma Chi, impensable. Mais la vie en fraternité est au-dessus de mes moyens. »

« Où vis-tu ? » Demanda Quin tout en me poussant vers le canapé de leur salon.

« À la maison, avec mon père. »

« Pas ta mère ? » Demanda Quin en rassemblant ses livres et en s’asseyant à côté de moi.

« Ma mère est morte quand je suis né. »

Quin resta paralysée. « Je suis désolée de l’apprendre. »

« Inutile d’être désolée. Ça s’est passé il y a longtemps. »

« Donc, ça a toujours été juste ton père et toi. »

« Ouaip. Et parfois juste moi. »

« Que veux-tu dire ? »

« Rien. Nous devrions commencer à réviser. J’ai le sentiment que nous avons beaucoup de choses à apprendre, » dis-je en changeant de sujet.

Bien que je n’aie jamais connu ma mère, cela restait un sujet difficile pour moi. Principalement à cause de mon père. Il ne le disait jamais, mais je pensais que sa perte l’avait profondément touché. Du moins, c’était ma supposition.

Quin commença en me montrant le diagramme de flux le plus organisé que j’avais vu de ma vie.

« Voilà ce que nous devons voir d’ici à jeudi, » dit-elle, en venant droit au but.

Son assurance fut presque suffisante pour me distraire de son genou se tenant à quelques centimètres du mien alors qu’elle sortait les livres de cours. Ou son odeur que je pus sentir lorsqu’elle se pencha en avant pour montrer quelque chose sur l’autre page. Sa douce odeur me rendait dur en permanence. Tout ce que je pouvais faire pour le cacher était de me pencher en avant.

« Tu n’arrêtes pas de te pencher en avant, tu as mal au dos ? »

« Mon dos ? Oui. C’est pour ça que je n’arrête pas de me pencher, à cause de mon dos. Je dois l’étirer. Tu sais, après l’entrainement. »

« Si tu veux, nous pouvons aller sur la table à manger. Les chaises ont un soutient légèrement meilleur, » suggéra gentiment Quin.

« Ouais, peut-être que ça serait mieux. »

« J’étais sur le point de me lever lorsque j’ai réalisé qu’il y avait un problème. J’étais toujours incroyablement dur.

« Humm, peut-être dans une minute. »

« Ton dos te fait vraiment mal, hein ? »

« Ouais, je souffre vraiment. »

« Je suis vraiment désolée. J’aurais aimé dire quelque chose avant. Ça va peut-être te sembler étrange, mais je peux te faire un massage si tu veux. J’ai appris à en faire il y a quelques années. Je n’ai pas eu beaucoup d’opportunités de m’entrainer, mais je pense que je reste plutôt bonne. »

« Humm… »

« Je suis désolée, est-ce que c’est bizarre ? Proposer de te faire un massage est bizarre, pas vrai ? » Dit Quin, se décomposant devant mon regard.

« Non, ce n’est pas bizarre du tout. J’adorerais que tu m’en fasses un. Ça me ferait vraiment du bien… Au dos. »

« Tu es sûr ? »

« Tu ne sais pas à quel point, » ai-je dit avec un sourire.

« Dans ce cas, d’accord… »

Quin regarda autour de nous. « Nous serons probablement plus à l’aise sur mon lit. »

Jamais je n’allais pouvoir me lever à présent.

« Je pense que le canapé ira très bien. »

« D’accord. »

Quin se leva et commença à étirer ses doigts.

« Déshabille-toi de façon à être à l’aise et allonge-toi. »

Une vague de chaleur me monta aux joues. Est-ce qu’elle venait vraiment de me dire ça ? L’idée de me mettre nu pour elle me rendit si dur que mon sexe se mit à tressaillir. Dieu seul savait ce qui se passerait si j’enlevais mon pantalon. Jamais je ne pourrais faire ça. Mais, je pouvais enlever mon t-shirt.

L’enlevant lentement, j’ai jeté un regard à Quin. Sa façon de me regarder me fit ressentir toutes sortes de choses. J’allais devoir penser longuement au baseball pour ne pas éjaculer dans mon boxer dès qu’elle me toucherait. Le risque en valait la chandelle, ceci dit. J’avais besoin de sentir ses mains sur moi. Et lorsque je fus allongé et qu’elle me monta dessus, j’eus l’impression de monter au paradis.

Alors qu’elle tirait et massait mes muscles, j’ai perdu toute notion de moi. Mon Dieu, ce que c’était bon ! C’était mieux que du sexe, du moins le sexe que j’avais connu. Et il ne fallut pas longtemps avant que je sente une sensation familière commencer dans mes bourses et monter lentement.

Oh, mon Dieu, j’allais jouir.

« Je dois aller aux toilettes, » dis-je en projetant la femme plus mince hors de mon dos et sur le canapé.

Par chance, je savais où ils se trouvaient et ils étaient ouverts. Fermant rapidement la porte derrière moi, j’eus à peine le temps d’enlever mon pantalon et boxer avant d’exploser en un orgasme.

J’ai grogné pour m’empêcher de hurler de plaisir. Je parvins à attraper la majeure partie dans ma main plutôt que de me répandre au plafond. Mais, lorsque ma tête se mit à tourner, je suis tombé au sol avec un bruit sourd.

 

 

Chapitre 5

Quin

 

« Ça va là-dedans ? » Ai-je demandé en entendant ce qui m’avait semblé être le porte-serviette se casser, puis quelqu’un tomber au sol.

« Ça va, » cria Cage en retour. « Mais je crois que j’ai cassé quelque chose. Désolé pour ça. »

« Ne t’en fais pas pour ça. Quoi que ce soit. Tu es sûr que tout va bien ? »

« Ouais, j’ai juste besoin d’une minute. »

Mais qu’est-ce que je foutais ? Ce n’était pas moi. Je ne proposais pas des massages aux hommes. Je ne leur demandais pas de se déshabiller pour moi. C’était juste qu’il y avait une odeur qui émanait de lui à laquelle je pouvais presque résister. Je ne parvenais pas à trouver ce que c’était, mais cela me faisait penser au sexe.

Mais m’assoir sur lui l’avait clairement fait paniquer. C’était pour ça qu’il m’avait écartée de lui et s’était précipité dans la salle de bain comme si ses cheveux étaient en feu.

Ce devait être elle qui devait me faire ça. C’était ma louve prenant encore le dessus. Mais, cela valait tout de même mieux que de me transformer et lui arracher la gorge. Je faisais des progrès. Et, il n’était pas étrange de proposer un massage à quelqu’un qui avait mal au dos, si ?

Argh ! Je ne sais pas. Je ne sais rien. Pourquoi est-ce que j’étais tellement nulle pour ces choses ? Peut-être qu’il vaudrait mieux que je laisse ma louve sortir pour faire ce qu’elle voulait. Cela ne pourrait pas causer un pire désastre que celui que j’étais déjà en train de créer.

« Tu es sûr de ne pas avoir besoin d’aide ? »

« J’ai la situation en main, » dit Cage, avant d’allumer le robinet puis de finir par sortir.

La vache, ce qu’il était beau à se tenir là, torse nu. Ses épaules puissantes et musclées, ses pectoraux saillants, ses abdos. Comment pouvait-il avoir des abdos sans rien contracter ? Il se tenait juste debout. Comment était-ce possible ?

Il me fixait avec un adorable regard de chiot et dit. « Désolé pour ça ? »

« Non, c’est moi, » lui dis-je me sentant coupable d’avoir franchi la ligne.

« Pourquoi est-ce que tu serais désolée ? » Me demanda-t-il comme s’il l’ignorait.

« Tu sais, parce que… »

« … Parce que tu étais prête à me donner des cours pour un examen que je dois réussir pour avoir la moindre sorte de vie et que j’ai rendu les choses étranges ? »

« Tu as rendu les choses étranges ? Je suis la reine pour ça. »

« Tu es peut-être la reine de quelque chose, mais cette fois c’est de ma faute. Écoute, pourquoi est-ce qu’on ne se remettrait pas à réviser ? »

« Comment va ton dos ? »

« Bien mieux à présent, merci, » dit-il en saisissant son t-shirt et en l’enfilant. « Ça m’a beaucoup aidé, je peux me concentrer à présent. Je me sens un peu endormi, mais je peux enfin me concentrer. »

Nous avons repris là où nous en étions, j’ai fait de mon mieux pour étouffer les impulsions émanant de ma louve très heureuse. Elle adorait être à proximité de Cage. Je ne pouvais pas lui en tenir rigueur, c’était aussi mon cas.

Mais, heureusement, même si nous avions beaucoup de choses à rattraper, nous en avons couvert une bonne partie avant le retour de Lou.

« Toujours en train de travailler ? On dirait un chien avec son os, vous ne trouvez pas ? » Dit Lou d’un ton joueur.

Cage regarda Lou, mal à l’aise.

« Ouais, je devrais y aller. »

« Ne vous en faites pas pour moi, » dit Lou. « Vous ne vous rendrez même pas compte de ma présence. »

« Ou nous pourrions juste aller dans ma chambre, » ai-je suggéré.

« Non ! » Dit-il de façon abrupte. « Je veux dire, nous pourrons reprendre demain. Il y a beaucoup de choses qui circulent là-dedans et je dois réorganiser tout ça, » dit-il en faisant des cercles autour de sa tête avec son doigt.

« Oh, ouais. Dormir aide à retenir les informations. Demain alors. Si tu veux commencer plus tôt, je finis les cours à 16 h. »