L'OURAGAN LANE

Chapitre 1

Julie

 

Vous connaissez ce sentiment d’avoir tout bien fait ? Vous suivez les règles. Vous tentez d’être quelqu’un de bien et ensuite la vie vous met un coup de pied aux fesses ? Et je ne parle pas d’un coup amical pour vous encourager à continuer. Je parle du genre de coup où la vie prend son élan et donne tout.

Peut-être que vous ne le voyez pas venir, peut-être que vous ne vous rendez compte de ce qui arrive que lorsque vous êtes face à une immense pile de bouse de vache… Parce que dans cette métaphore, vous êtes dans une ferme, ne posez pas de question. Vous comprenez où je veux en venir. Vous tentez simplement de faire de votre mieux et de vivre comme tout le monde vous a dit que vous devriez faire et la vie vous dévore tel un chien enragé… Qui vivrait aussi à la ferme.

Et bien c’est ma situation alors que je suis assise dans le bureau de mon gestionnaire de missions temporaires. Bill est le garçon qui est censé me trouver du travail. Et il m’en a trouvé. Est-ce qu’il m’en a trouvé suffisamment pour que je m’en sorte ? Oui, à peine.

Pour être franche, je ne peux pas en vouloir à Bill pour ma situation. La seule à qui je peux en vouloir c’est la vie. Je travaille. J’ai reçu des missions, je suis arrivée à l’heure et j’ai fait ce que l’on me demandait.

Lorsque je suis sur place, je suis amicale, mais pas trop. Je souris poliment même lorsque les gens font des mauvaises blagues. Et je fais en sorte de connaitre non seulement les noms de tout le monde, mais de les utiliser dans une phrase pour leur montrer que je le connais.

« Oui, Aiden, ce meme de bébé Yoda est très amusant. Oui, Bri, j’ai bien reçu le meme de bébé Yoda d’Aiden. Oui, Pat, je sais bien qui est bébé Yoda et je ne dis pas ça uniquement parce que tout le bureau semble ne parler que de ça et que si je dis que je ne sais pas ce que c’est, on dira que je suis l’intérimaire étrange qui ne trouvera jamais de mari et mourra probablement seule. »

… D’accord, je suis allée loin très vite. Mais vous voyez ce que je veux dire. Je suis une bonne intérimaire. Et pourtant, pour une raison inconnue, je n’arrête pas de travailler sur ces missions censées durer deux ou trois mois et avant d’avoir atteint la moitié, je suis convoquée dans le bureau de Bill, comme je le suis aujourd’hui, pour me voir dire la même chose.

« Bon, Julie, j’ai une mauvaise nouvelle. »

« Ne le dis pas, Bill. »

« Je suis désolé. Nous allons devoir te remplacer sur cette mission. »

« Mais pourquoi ? Je ne comprends pas. Est-ce que j’ai fait quelque chose de mal ? »

« Tu n’as rien fait de mal. »

« Alors pourquoi est-ce que je suis remplacée ? »

« C’est une raison interne. »

« C’est une raison interne ? Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ? En quoi est-ce que ma mission en tant que gestionnaire de facturation dans une entreprise de plastique a des ‘raisons internes’ ? » Ai-je demandé à Bill, m’approchant de mon point de rupture.

Bill me regarda puis haussa les épaules. « Que veux-tu que je te dise ? Je suis désolé. Je fais simplement ce qu’on me dit. Mais, je te le promets, tu n’as rien fait de mal. Tu as été une excellente employée où que tu ailles. Tout le monde t’aime. Je suis sûr que je te trouverais quelque chose d’autre très rapidement. »

« Mais, tu ne comprends pas. J’ai besoin de ce travail. Avec… L’hypothèque et mon prêt étudiant. Je m’occupe de ma mère, et… »

J’ai arrêté de parler lorsque je me suis rappelé la règle de base de l’intérim. Personne ne s’intéresse à vos problèmes. Chacun a les siens et si vous voulez continuer à travailler ici, vous gardez vos problèmes pour vous. Ces gens ne sont pas vos amis. Juste des collègues sous-payés qui remplissent le vide de leur vie avec des memes. Quoi ? Trop sombre à nouveau ? Bref, vous voyez ce que je veux dire.

« Bill, si tu peux me trouver quelque chose le plus rapidement possible, je t’en serais vraiment reconnaissante. J’avais besoin de l’argent de ce boulot. »

« Je te promets que dès que j’ai une offre qui te correspond sur mon bureau, je t’appelle. Promis. » Dit Bill, semblant sincère.

« Je t’en serais vraiment reconnaissante, » dis-je tentant de lutter contre l’abysse du désespoir qui semblait s’ouvrir en moi.

Me levant, je sens mon téléphone vibrer. Dès que je suis hors de son bureau, je sors mon téléphone. C’est un message de Bill. Sans l’ouvrir, je me retourne vers lui.

« Est-ce que tu viens de m’envoyer un message ? »

« Oui. Tu sembles vraiment déprimé. Je me suis dit que tu pourrais t’envoyer quelque chose qui me remonte le moral. »

Je me suis tourné vers le message et l’ai ouvert. C’est un meme de bébé Yoda. Il faut vraiment que je cherche d’où vient bébé Yoda. « Game of Thrones » peut-être ?

J’ai remercié Bill d’un petit sourire, les lèvres serrées et suis partie. Traversant le bureau en open-space et en observant tous les jeunes visages impatients en train de s’inscrire pour à « Intérim temporaire », je ne pus m’empêcher de me demander où les choses s’étaient gâtées pour moi. Ma vie n’était pas censée être ça.

Les choses se passaient bien à Seattle. J’avais un boulot. J’avais des amis. J’avais des projets les samedis soir. Mais lorsque ma mère est tombée malade et que j’ai dû retourner à Calabasas, en Californie, une ville dont la première exportation est les Kardashian. Ouais, ce n’est pas un bon endroit où être fauché et sans emploi.

La bonne nouvelle c’était que ma mère allait beaucoup mieux à présent. Elle avait un cancer. Ils l’avaient détecté rapidement. Elle était en rémissions complète et presque de retour à la normale.

L’inconvénient était que le traitement lui avait non seulement couté toutes ses économies, mais l’avait aussi laissée sans emploi pendant plusieurs mois. Ma mère gagnait beaucoup d’argent avant. Elle était… Je veux dire, elle est la Vice-Présidente d’une entreprise de divertissement à succès. Cela lui avait permis de rembourser son hypothèque il y a quelques années.

Payer pour mes frais de scolarité avait été la raison de la prise d’une seconde hypothèque sur sa maison. Elle n’aurait pas eu non plus de problème à la rembourser sans tous ces frais médicaux. Et oui, elle était assurée.

Alors, puisqu’elle avait besoin que quelqu’un s’occupe d’elle, j’avais quitté mon travail et Seattle pour emménager avec elle. Étant donné sa situation financière, j’ai commencé à chercher un travail dès qu’elle a commencé à se sentir mieux. N’étant pas sure de pouvoir rester longtemps à Calabasas, je me suis inscrite à « Intérim temporaire ». Mais puisqu’ils n’arrêtaient pas de me tirer le tapi de sous les pieds, je n’avais pas réussi du tout à aider ma mère. À présent, elle risquait de perdre sa maison.

Vous connaissez cette sensation de culpabilité à vous retourner le bide parce que votre mère a pris une deuxième hypothèque pour vous payer votre éducation et que vous devenez la pire fille du monde parce que vous ne parvenez même pas à garder un travail suffisamment longtemps pour l’aider, ce qui vous envoie dans une spirale de désespoir et de dépression ? Ouais, moi non plus. Je demandais juste pour une amie.

Alors que ma vie entière semblait s’effondre autour de moi, j’ai fait ce que tout habitant de Calabasas qui se respecte ferait. J’ai acheté une tasse de café à 6 $. Est-ce que j’aurais pu trouver un café moins cher ailleurs ? Bien sûr. Mais le café n’était pas le sujet. C’était l’expérience lors de la commande. Voyons ça comme une petite folie pour mon repas de midi. 6 $, ce n’est plus grand-chose vu comme ça, pas vrai ?

Assise sur le patio du café faisant face à l’agence d’intérim, je regardais les bureaux, me demandant ce que j’étais censée faire à présent. Je ne pouvais pas continuer à travailler avec eux. « Ils m’ont viré pour des raisons internes ? » Qu’est-ce que ça veut dire ? Et en quoi était-ce juste ?

Si un jour je décidais de ne pas me présenter à une mission, je serais mise sur liste noire. Mais ils pouvaient me retirer d’une mission alors même que, comme l’a dit Bill, tout le monde m’aimait bien et que je faisais de l’excellent travail ? Pourquoi est-ce que tout ça m’arrivait ?

C’est alors que les larmes ont commencé à me monter aux yeux pendant que je regardais autour de moi que je vis quelqu’un que je ne me serais jamais attendu à voir. C’était un garçon que j’avais connu à la fac. Du moins c’est ce qu’il me semblait. L’université allait bientôt dater d’il y a dix ans. Et ce n’était pas quelqu’un avec qui j’étais ami, mais je l’avais régulièrement croisé sur le campus.

Nous étions tous les deux allés dans une petite fac du Middle West. Le campus n’était pas suffisamment grand pour ne pas reconnaitre les gens. Quelles étaient les chances de le croiser à un café, au milieu de la journée, à Calabasas ?

 La partie délicate venait ensuite. Je le reconnais, mais je ne me souviens plus de son nom. Est-ce que je tente de lancer une conversation ? Pourquoi faire ? Ce n’était pas comme si nous étions amis.

D’un autre côté, je ne me souvenais pas qu’il ait été si beau garçon. Ce n’était pas comme s’il faisait partie de la brigade des mecs en permanence en jogging à l’université, mais les chemises qu’ils portaient lui allaient comme de mauvaises habitudes. C’est le genre de garçon qui, dans un autre état d’esprit, m’aurait fait penser au sexe. Ça vaut le coup de tenter de retrouver un prénom oublié, non ? Évidemment. Ce n’est pas comme si ma situation pouvait empirer.

« Désolée, » dis-je en attirant l’attention du bel homme. Lorsqu’il se tourna vers moi, il eut ce regard d’acier qui, si j’avais été dans un meilleur état d’esprit, m’aurait rendue toute chose. « On se connait ? »

Le bel homme me fit un beau sourire. « Je ne sais pas. Vous me connaissez ? »

Il dit ça comme s’il était célèbre ou quelque chose dans le genre. Attendez, étais-je vraiment allé à l’université avec lui ou est-ce que je l’avais juste vu à la télévision ? Foutu Calabasas !

« Non, nous sommes allés à l’université ensemble, pas vrai ? A Beloit ? »

L’expression de l’homme changea en entendant ce nom. Il me regarda, tentant clairement de comprendre ce qui se passait. Il lui fallut une seconde, mais son sourire revint.

« Attendez, oui. Oui, je te connais. Tu vivais… Comment s’appelait le dortoir le plus proche du gymnase ? C’était en dernière année. » Dit-il d’un ton excité.

« Haven. Ouais, au dortoir Haven. En dernière année effectivement. Bien vu, » dis-je, sentant une lueur d’espoir, me souvenant d’une époque où ma vie était pleine de possibilités.

« C’est ça, Haven, » accepta-t-il en souriant. « Lane, » dit-il en me faisant signe, à deux tables de distance.

« Julie. »

« C’est ça, Julie, » dit-il comme s’il reconnaissait mon nom.

Lane me regarda pendant un instant avec un sourire plaisant sur le visage et me fit un geste comme pour me demander la permission de s’approcher.

« Je t’en prie, » lui dis-je, acceptant volontiers la compagnie.

« Alors Julie, qu’est-ce que tu deviens ? Qu’est-ce que tu fais à Calabasas ? Tu habites ici ? »

Voici le moment délicat. Qu’étais-je censée lui dire ? Dans ce genre de situation n’êtes-vous pas censé vous vanter l’air de rien de toutes les choses incroyables qui se passent dans votre vie ? Alors, qu’est-ce qui correspondait pour moi ? Je pourrais lui dire que j’avais récemment trouvé un billet de 10 $ dans l’une de mes poches de pantalons, mais je ne voulais pas le rendre jaloux à ce point. 

« Honnêtement, pas grand-chose, » décidais-je plutôt de lui dire. « Je me suis installée à Seattle pendant un moment, mais ma situation familiale m’a ramené ici. »

« Tu es de la région ? » Demande Lane, devenant plus beau à chaque seconde qui passait.

« Ouais, pas de Calabasas, mais de la Californie du Sud. »

« Et où travailles-tu ? Que fais-tu ? »

Il était obligé de me poser la question, pas vrai ? C’était typique de L.A de demander ça. Je n’avais pas assez d’énergie pour lui mentir. La journée avait été longue donc je lui ai dit la vérité.

« Je ne travaille nulle part, en fait. »

« Oh, es-tu mariée ? »

J’ai éclaté de rire. Je n’avais fréquenté personne depuis mon retour ici. Mes parties féminines s’étaient déclarées en chômage de longue durée.

« Non. Je cherchais juste quelque chose de temporaire parce que je ne sais pas combien de temps ma situation familiale durerait et l’agence pour laquelle je travaille semble incapable, » dis-je, décidant de m’en prendre à eux pour ma situation.

« Oh, d’accord, » répondit-il, son intérêt diminuant rapidement. Saleté de L.A !

« Mais, et toi ? Qu’est-ce que tu deviens ? Tu sembles bien t’en sortir. »

Cela me permit de récupérer son attention. Qui aurait pu savoir qu’un homme aimerait parler de lui-même ?

« En fait, je m’en sors très bien. Je possède une société de placement.

« Vraiment ? » Demandais-je, comprenant brusquement ce qu’il voulait dire par « très bien ».

« Ouais, j’ai déménagé à New York juste après la fac pour travailler dans une grande banque. J’ai vendu quelques actions juste avant le crash et ai fait fortune, » dit-il avec un sourire à un million de dollars.

« Alors, quand l’économie s’effondrait ? » Lui demandais-je.

« Je faisais fortune. »

« Euh, » dis-je alors que je commençais à chercher la morale dans sa façon de faire fortune.

« Mais ne me confonds pas avec un de ces trous de balle de banquier qui a fait fortune en spéculant sur des hypothèques. Ce n’était pas mon cas. »

« Non, tu as simplement fait fortune en pariant sur la défaillance de ces banques. »

« En fait, j’ai parié qu’elles seraient trop grosses pour tomber, » dit-il avec un autre sourire.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas repensé à cette époque. Nous étions juste de jeunes diplômés, entrant sur un marché du travail en ruine. Ce n’était pas quelque chose auquel j’avais de l’énergie à consacrer à l’instant.

« Alors, tu es marié ? » Lui demandais-je, tentant de passer aux choses intéressantes.

« Non, je ne suis pas marié, » me dit-il d’un ton sans émotion.

« Une personne spéciale ? »

« Non, rien. »

« Comment est-ce possible ? » Demandais-je comme si je flirtais… Ce qui était le cas.

« Qui sait, » dit-il avec un sourire charmeur.

Ouais, je venais de découvrir tout ce que j’avais besoin de savoir. Il n’était pas marré parce qu’il ne voulait pas l’être. Il était clairement du genre à vouloir garder ses options ouvertes. Si aujourd’hui devait se finir au lit, il faudrait que je m’en souvienne. Non pas que ça puisse être le cas… »

« Je vois, » dis-je en lui rendant son sourire.

« C’est amusant que tu m’aies demandé ça, » dit-il comme s’il voulait que j’insiste.

« Pourquoi ? »

Lane se recula dans son siège et tourna la tête. « Tu t’es déjà retrouvé dans une situation étrange, ne sachant pas comment tu étais arrivé là ? »

« Lane, tu ne sais pas à quel point ça m’arrive régulièrement. C’est mon état naturel. »

Lane rit doucement. » Alors peut-être que tu peux comprendre mon état d’esprit. Je vais aller aux Bahamas dans environ une semaine… »

« Non, je ne m’identifie plus là, » dis-je en l’interrompant. Il rit à nouveau.

« Je vais là-bas dans une semaine et je vais passer du temps avec un ami. »

« Ça semble sympa. »

« Ouais, mais j’ai peut-être un peu exagéré la vérité à mon ami. »

« Comment ça ? »

« Je lui ai dit que je voyais quelqu’un et qu’elle viendrait avec moi. »

« Pourquoi lui avoir dit ça ? » Demandais-je, perdue.

« Je ne sais pas. C’est juste un mec qui me fait me sentir… il y a des personnes qui vous font vous sentir mal à propos de vous-même, peu importe à quel point vous réussissez, pas vrai ? Pour moi c’est lui. »

La vache, à quel point est-ce que son ami est riche pour qu’un investisseur à succès comme lui se sente complexé ?

« Je pense avoir une idée de ce que ça fait, » lui dis-je avec une empathie sincère.

« Ouais, et bien, c’est lui. Et pour ne pas avoir l’air d’un naze complet, je dois trouver quelqu’un pour venir avec moi et faire semblent d’être ma fiancée. »

« Ta fiancée ? »

« Ouais, je sais, » dit-il en baissant la tête et en se frottant les sourcils, frustré.

« Je dois bien dire que tu es face à un sacré dilemme Lane. Alors, tu vas lui dire la vérité ? »

« Oh, mon Dieu, non. Je ne peux pas faire ça. »

« Pourquoi pas ? »

Lane fit une pause pendant un instant, comme s’il venait de penser à quelque chose. « Je ne peux juste pas. »

« Alors, que vas-tu faire ? »

« Je dois trouver quelqu’un. »

« Tu dois trouver quelqu’un pour aller aux Bahamas avec toi. Ouais, bonne chance, » plaisantais-je.

« Ce n’est pas aussi facile que tu le crois, » protesta-t-il.

« Vraiment ? Tu n’arrives pas à trouver quelqu’un pour aller aux Bahamas avec toi ? »

« Non, je n’y arrive pas. »

« J’ai du mal à y croire. »

« Je peux le prouver, » dit Lane, d’un ton confiant.

« Comme ça. Julie, est-ce que tu aimerais venir aux Bahamas avec moi et faire semblant d’être ma fiancée ? »

« Oh, j’adorerais, mais je ne peux pas, je dois travailler. »

« Tu vois ! » Dit-il d’un ton triomphant.

« D’accord, je vois ce que tu veux dire. Mais la seule raison pour laquelle je ne peux pas venir est que je dois travailler. Crois-moi ou non, je le ferais volontiers. Je ne peux pas te dire à quel point j’ai besoin d’un voyage aux Bahamas en ce moment. »

« À cause de l’histoire familiale ? » Demanda-t-il, devenant plus sérieux.

« C’est une histoire d’argent. Je dois vraiment bosser. Je veux dire, je ne vais pas rentrer dans les détails, mais j’ai vraiment besoin d’argent.

Vous connaissez ce sentiment lorsqu’un garçon suuuuuuper canon et suuuuuuper riche vous regarde avec une lueur dans le regard qui vous donne envie de vous jeter sur lui ? Et bien, c’était peut-être ce que je ressentais à l’instant.

« Pourquoi est-ce que tu me regardes comme ça ? » Lui demandais-je.

« La seule chose qui t’empêche de m’aider est l’argent ? »

« Ouais. Je ne sais pas dans quel monde tu vis, mais dans le mien, l’argent compte beaucoup. »

« J’en suis sûr. Mais c’est quelque chose que j’ai, » dit-il, commençant à sourire, plein de confiance.

Je n’étais pas sure de savoir où il voulait en venir avec ça. « Qu’est-ce que tu suggères ? »

« Combien faudrait-il pour régler ta « situation familiale » ? »

« Combien ? Mon Dieu, je ne sais pas. Probablement plus que ce que tu as. »

Lane pencha la tête, semblant douter. Mon Dieu, ce que ce type était arrogant. À quel point est-il riche ? Ma situation familiale pourrait être dans les millions.

« Donne-moi un chiffre, » dit-il, me faisant me demander ce qui se passait.

Me redressant, j’ai regardé Lane à nouveau. À quel point est-ce que je me souvenais de lui à l’Université ? Pas énormément. Je crois me souvenir qu’il était un peu arrogant déjà à l’époque. Je n’avais pas eu beaucoup d’interactions avec lui, mais je commençais à me souvenir d’amies pour qui ça avait été le cas. Si je me souvenais bien, il était un peu un séducteur.

Et est-ce qu’une de mes amies n’était pas venue me voir en pleurant par sa faute ? C’était à cause de Lane ou d’autre chose ? C’était il y a trop longtemps, il est difficile de s’en souvenir.

Quoi que ce soit, c’était il y a dix ans. Les gens changent, les situations changent. Plus important que tout ça, ma situation avait changé. Et devant moi se trouvait un garçon me demandant de combien j’avais besoin pour me sortir du trou dans lequel je m’étais perdue. Qu’est-ce que je devrais lui dire ?

Si son offre était réelle, je ne voulais certainement pas lui faire peur en donnant un chiffre top élevé. En même temps, il se vante d’avoir beaucoup d’argent. Pourquoi ne devrais-je pas au moins être honnête ? »

« 200 000 $ »

« 200 000 $ ? » Demanda-t-il avec un grand sourire.

« Ouais. Il y a des frais médicaux, et un prêt étudiant qui… »

« Vendu, » dit-il en m’interrompant.

« Quoi ? » Demandais-je, sure de l’avoir mal compris.

« J’ai dit, vendu. Je le ferais. Si tu viens avec moi aux Bahamas et fais semblant d’être ma fiancée, je te paierais 200 000 $. »

J’étais sous le choc. Il s’en rendait compte, c’était certain. Il me regardait avec un sourire arrogant sur le visage et je ne savais pas ce que cela me faisait ressentir. Dans quoi est-ce que je me suis lancé ? Pour une raison inconnue, j’avais l’impression d’être une souris piégée par un chat.

Pourquoi est-ce que je ressentais ça d’ailleurs ? Lane n’était pas un chat, c’était mon sauveur. Ce chiffre rembourserait ce que ma mère avait dépensé pour mon éducation. Ça n’effacerait pas ses frais médicaux, mais rembourserait son hypothèque et lui donnerait un répit nécessaire entre maintenant et le moment où elle pourrait retourner travailler.

Ce n’était pas un million de dollars, mais c’était suffisant pour ne pas se faire expulser de sa maison. Cela me permettrait de revenir à la situation précédente, avant que l’enfer ne se déchaine contre moi. Est-ce que c’était vraiment en train de se passer ?

« La moitié d’avance, » dis-je brusquement.

« Quoi ? » Répondit-il, pris par surprise.

« J’aurais besoin d’en voir la moitié avant de partir, » lui expliquais-je.

Il me regarda, reprenant sa confiance en lui. « Et comment est-ce que je peux être sûr que tu ne vas pas juste prendre l’argent et disparaitre ? »

« Et comment puis-je être sure que tu me paieras à la fin ? Comment est-ce que je peux être sure que tu as cette somme ? »

Lane éclate de rire comme si suggérer une telle chose était ridicule. Combien d’argent possédait vraiment ce type ?

« Tu sais quoi, » Lane sortit une carte de sa poche. « J’adorerais te parler de tout ça plus en détail, mais peut-être que nous devrions d’abord faire des recherches l’un sur l’autre avant de nous engager complètement. Voici ma carte. Fais des recherches et donne-moi ta réponse demain. Si tu as une meilleure offre entretemps, je comprendrais. Sinon, je suis vraiment content de t’avoir croisé et je pense que tu adoreras mon ile privée. »

Après ça, Lane poussa sa carte devant moi, se leva et se dirigea vers la voiture la plus chère que j’avais jamais vue. Je crois qu’il s’agissait d’une Jaguar, à prononcer avec un accent anglais. Je ne suis pas une fana de voiture, mais elle était vraiment belle.

Après avoir entendu le rugissement du moteur et l’avoir regardé partir, je jetais un œil à sa carte. Elle disait, « Lane Toros, Triad Investments ». Après avoir cherché ça sur mon téléphone, sa photo fut la première chose qui apparut. Il s’avéra qu’il n’avait pas exagéré. Il était incroyablement riche.

Son entrepris e gérait plus de cinq milliards. La raison de son rire quand j’avais suggéré qu’il n’avait peut-être pas l’argent devenait claire. Si l’avait laissé tomber un billet de cent dollars, il n’aurait peut-être même pas pris le temps de le ramasser.

Et est-ce qu’il avait dit posséder une ile privée aux Bahamas ? Est-ce que tout ça pourrait être vrai ? Ne devait-il pas y avoir une sorte de piège ?

 

« Est-ce que tu devras coucher avec lui ? » Me demanda ma mère, perturbée.

« Devras ? »

« Oui. Est-ce qu’il te forcera à coucher avec lui ? »

« Me forcera ? » Demandais-je alors que je sortais mon téléphone pour lui monter une photo de lui.

Ma mère regarda la photo de Lane en silence, réfléchissant à l’aspect moral de la prostitution lorsqu’il s’agit du plus bel homme au monde.

« Il semble très gentil, » dit ma mère, déduisant clairement l’ensemble de sa personnalité de la photo torse nu que je lui montrais. « Mais qu’est-ce que tu sais de lui ? »

« Je veux dire, je suis allé quatre ans à l’université avec lui. »

« Alors vous étiez amis à l’époque ? »

« Non, mais je me souviens de lui. Il connaissait des amis à moi. » En disant ça, je voulais dire qu’il avait couché avec elles.

« Et elles se porteraient garantes pour lui ? »

« Je suppose. » Et en disant ça, je voulais dire qu’elle le traiterait d’obsédé.

Mais je ne pouvais pas dire ça à ma mère. Elle s’inquièterait et me dirait de ne pas faire ça. Mais je devais le faire. Elle avait des mois de retard dans ses remboursements d’hypothèque. Une notice d’expulsion pourrait arriver d’un jour à l’autre. Je devais faire ça.

Et si je devais finir par coucher avec le célibataire le plus canon et couru de l’univers tout en faisant ça, et bien je suppose que c’était une balle que j’étais prête à prendre. Regardez-moi, prête à me sacrifier pour l’équipe. Je suis quasiment une sainte.

Je dois bien admettre que sa réputation de l’époque et que la façon dont il m’avait surpris lorsque je lui avais demandé pourquoi il n’était pas marié m’inquiétait un peu. La dernière chose que je voulais était de m’attacher émotionnellement à un type qui était incapable de la réciproque. Je savais ce que c’était. J’avais vécu ça. J’avais même acheté le t-shirt souvenir… Puis l’avait brulé avec le maillot de foot qu’il aimait clairement plus que moi. C’est une longue histoire.

Mais Lane ne me demandait rien du genre. Tout ce qu’il cherchait c’était quelqu’un pour faire semblant d’être sa fiancée pendant une semaine pour impressionner son ami milliardaire. M’accrocher à lui pendant une semaine ne me dérangeait pas. Tant que je garde en tête que c’est un travail et que tout ce que je fais est de faire semblant, alors je n’attraperais pas de sentiments.

Je ne suis pas le genre de fille à tomber amoureuse du premier milliardaire canon qui a probablement changé depuis la face et a à présent un sourire à tomber que je croise. Non, ce n’est pas mon genre. Et, honnêtement, j’ai de la peine pour ces filles.

« Allo, Lane ? C’est Julie. Nous nous sommes rencontrés aujourd’hui au café. En fait, nous nous sommes rencontrés à l’université. Nous nous sommes revus au café… Aujourd’hui… à Calabasas. » Reprends-toi Julie !

Lane éclate de rire. « Oui, je me souviens. Tu as réfléchi à ma proposition ? »

« Oui et… Non… » Attendez, qu’est-ce que je viens de dire ?

« Est-ce que tu viens de dire non ? »

Est-ce que je viens de dire non ? « Ouais, non. » Répétais-je, ne reconnaissant pas la folle autodestructrice qui avait pris le contrôle de ma bouche. « C’est une offre très généreuse, et j’ai vraiment besoin de cet argent. Je veux dire, vraiment. Mais ça me semble juste vraiment trop étrange. »

« Comment ça ? C’est juste un type que tu n’as pas vu depuis dix ans qui te proposes 200 000 $ pour faire semblent d’être sa fiancée pour impressionner son ami. Qu’y a-t-il d’étrange là-dedans ? »

« Tu plaisantes ? Tout. »

Lane éclate de rire à l’autre bout du fil. « Écoute, je comprends. C’est bizarre. Tout ça est étrange. Et c’est pour ça que j’ai eu tellement de mal à trouver quelqu’un pour faire ça pour moi. Désolé de t’avoir embêté avec ça. Bonne vie à toi. »

« Attends, c’est tout ? » Dis-je, n’aimant rien de tout c qui venait de se passer.

« Comment ça ? »

« Je veux dire, tu vas juste abandonner ? »

« Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? » Demanda Lane, semblant brusquement perplexe.

« Je ne sais pas. Tu pourrais tenter de me convaincre que ça ne serait pas étrange, » lui dis-je, ayant l’impression que ça ne devrait pas être à moi de le faire.

Lane éclata à nouveau de dire. « D’accord. Pourquoi est-ce que tu trouverais ça étrange ? »

« Je ne sais pas. Ça fait beaucoup d’argent simplement pour faire semblant. »

« C’est le montant que tu as demandé. »

« Ouais, mais… Je veux dire… Quand tu dis que je dois faire semblant d’être ta fiancée, qu’est-ce que ça implique ? »

« Est-ce que tu demandes si je m’attends à ce que tu couches avec moi ? »

« Évidemment que c’est ce que je te demande. De quoi pourrions-nous parler d’autre ? »

Lane éclate à nouveau de dire. « Juste pour que les choses soient claires, je ne m’attends pas à ce que tu couches avec moi. Ce que j’attends de toi est que tu fasses croire à mon ami que nous sommes vraiment fiancés. Ce faux-semblant se termine dès que nous serons dans la chambre. »

« Donc nous partagerons une chambre ? »

« Évidemment. Quel couple fiancé ne partage pas une chambre ? »

« Et… Est-ce qu’il y aura… Comment dire ça ? »

« Deux lits ? »

« Oui. Comment organiserons-nous les nuits ? »

« Il n’y aura qu’un lit. Si tu préfères, je pourrais dormir par terre. Est-ce que cela te rendrait les choses moins étranges ? »

« Oui, en effet, mais tu dormirais sur le sol de ton ile privée. Ça serait étrange aussi. »

« Alors comment aimerais-tu que l’on s’organise ? »

« Et si nous gardions la possibilité de dormir par terre, mais que nous improvisions au fur et à mesure ? » Lui dis-je, tentant d’être réaliste.

« Ça me semble être un compromis acceptable. Est-ce que tu voulais parler d’autre chose ? »

« Non, je crois que c’est tout. »

« Est-ce que ça veut dire que tu acceptes ? » Demanda Lane d’un ton détendu.

« Je suppose. Ouais, d’accord, j’accepte. »

« Et tu es d’accord pour être payée après ? »

Je repensais à cette partie de l’histoire à nouveau. « Et bien j’ai fait mon enquête, tu sembles avoir les moyens. »

« Donc c’est un oui aussi ? »

« Ouais, d’accord, » dis-je ne reconnaissant à nouveau plus la folle qui avait repris le contrôle de ma bouche.

« Génial. »

« Mais j’ai une autre question. »

« Dis-moi. »

« Pourquoi est-ce que les articles te surnomment l’ouragan Lane ? »

Lane éclata de rire. « C’est à cause d’une acquisition que j’ai faite il y a quelques années. Parfois, lorsque l’on prend le contrôle d’une entreprise, il faut secouer les choses. J’ai secoué les choses et ai vexé quelques égos. Depuis cette époque, la presse me surnomme ainsi. Je ne sais pas pourquoi, mais ça ne me déplait pas. Ça me rend intéressant, tu ne trouves pas ? »

« Absolument, » lui dis-je en réponse à son explication parfaitement rationnelle.

« Autre chose ? »

« Ouais, une dernière chose. Combien de temps allons-nous passer là-bas ? »

« Je ne sais pas. Mais je te dirais de prévoir d’y être pour trois semaines. Disons un mois. Ça pourrait n’être qu’une semaine. Tout ça dépend de comment les choses se passent avec mon ami. »

« Comment ça ? »

« Anticipe un mois. Si ça dure moins longtemps, ça durera moins longtemps. »

« D’accord. Et quand partons-nous ? »

« D’ailleurs j’ai parlé à mon ami aujourd’hui. Est-ce que tu peux partir dans trois jours ? »

« Trois jours ? Je croyais que tu avais dit que nous partirions dans une semaine ou plus ? »

« En effet, mais les choses avancent vite. C’est faisable pour toi ? »

« Humm… Ouais. D’accord, je peux le faire.

« Génial, mon assistant t’enverra l’itinéraire. Merci de faire ça pour moi. Tu m’aides beaucoup. »

« Et tu m’aides beaucoup. C’est un plaisir de faire affaire avec toi. »

« Un plaisir partagé, » dit-il. Je pus presque l’entendre sourire au bout du fil.

Après avoir raccroché, je me suis sentie beaucoup mieux. Il avait clairement changé depuis l’université. Il ne pouvait plus être le même type qui avait fait pleurer mes amies. Peut-être que les choses n’étaient pas de sa faute déjà à l’époque.

Je devais l’admettre, j’étais un peu plus sauvage à l’époque. Rien d’excessif cependant. Mais mes amies étaient toutes folles. Elles étaient drôles et je les adorais, mais leur inspiration était une chanteuse qui avait mis le feu à la maison de son petit-ami. Cela paraissait raisonnable à l’époque, mais en prenant du recul, ouille !

Donc peut-être que Lane n’était pas si pire que dans mes souvenirs. Peut-être qu’il avait juste mauvaise réputation. Et même s’il n’était pas l’homme idéal à l’époque, qui était la meilleure version de soi à l’université ? Certainement pas moi. Nous sommes tous différents à présent. Nous méritons tous un nouveau départ. Et avec l’argent que je gagnerais grâce à ce travail, je pourrais m’en offrir un.

Devant partir dans trois jours, j’avais beaucoup de choses à faire. Ce qui était super c’est qu’en plus des 200 000 $ que Lane me donnait, il y avait ce que j’avais surnommé, l’argent de poche de la petite-amie. Il s’agissait de 2 000 $ que je pouvais utiliser pour me transformer en quelqu’un qui donnait l’impression de fréquenter un milliardaire. Manucure, coiffure, épilation, vous voyez, les classiques. Puis il y avait ma garde-robe.

Je suis allé faire du shopping à Beverly Hills afin d’être crédible. Là-bas un bikini pouvait couter 800 $. 800 ! Donc je suis ensuite allée dans cette petite boutique française appelée Targèt. J’ai pris quatre maillots et des encas pour moins de 200 $. C’est exact, 200 $ ! C’est qui le taulier ? C’est ce que disent les gens, pas vrai ?

J’ai reçu notre couverture la veille du départ. Apparemment, nous nous étions rencontrés il y a seulement quatre mois. Nous avons clairement eu le coup de foudre. Il m’avait offert un vol pour Paris la semaine dernière et m’avait demandé en mariage. Notre fête de fiançailles imaginaire avait été très romantique. Mais est-ce que je vous ai parlé de mon jetlag imaginaire ? Il avait été horrible.

N’ayant pas parlé à, ni vu Lane les trois jours précédents notre voyage, je m’attendais à le retrouver dans la voiture qu’il avait envoyée pour me chercher. Ce ne fut pas le cas. Je m’attendais alors à le voir à l’enregistrement. Il n’était pas là non plus. En fait, je ne le vis même pas durant mon vol jusqu’en Floride. Je dois avouer que si c’était une indication de comment notre mariage imaginaire allait se passer, ces fausses fiançailles n’allaient pas durer.

Ce ne fut que lorsque j’étais nerveusement sur le point de monter dans mon vol en direction de Bimini que j’ai reçu un message de sa part.  Il disait, « Coucou, ma chérie. Je suis impatient de te voir à l’aéroport. Tu vas adorer l’ile. »

Le message m’apaisa. Ce n’était pas une nouvelle version de Koh-Lanta où des milliardaires envoyaient des femmes insouciantes sur une ile déserte où elles devraient lutter pour la nourriture et un prix de 200 000 $. Je ne dis pas que je ne le ferais pas… Et que je ne gagnerais pas. Je dis juste que je viens de me faire refaire les ongles… Donc, je vous attends les pétasses !

En approchant de l’ile, j’ai contemplé l’eau. Je n’avais jamais été aux Bahamas auparavant. J’avais vu des photos, mais elles ne m’avaient pas préparé à ça. C’était magnifique. J’ignorais jusqu’à l’existence de cette nuance de bleu. Et plus nous nous rapprochions de l’ile, plus j’étais sure de pouvoir distinguer des poissons nager dans l’eau cristalline.

Cela signifiait par contre qu’ils étaient d’une taille suffisante pour refroidir mes envies de nager à leurs côtés. Mais la vue était magnifique.

Après avoir atterri sur une toute petite piste, je fus très heureuse de me retrouver à nouveau sur la terre ferme. Lorsque la porte de l’avion s’ouvrit, je fus surprise de sentir à quel point il faisait chaud. Je suppose que c’était moins la chaleur que l’humidité, mais cela restait quand même un choc. Je me mis immédiatement à transpirer ce qui ne m’allait pas au teint.

Après avoir traversé le tarmac et être entré dans l’aéroport, je continuais à m’attendre à voir Lane. Tout ça était nouveau pour moi. À l’exception de mes fiançailles imaginaires, je n’étais jamais sortie du pays auparavant. Je ne savais pas trop ce que j’étais censée faire. Je veux dire, l’endroit n’était pas immense donc il n’y avait pas cinquante endroits où aller. Mais quand même.

Suivant la personne se trouvant devant moi, j’arrivais devant un petit bâtiment. Tout cela manquait de cérémonie. Allons, personne ne savait qui était mon faux fiancé ?? Il pouvait acheter et revendre cet endroit. Je ne voulais pas faire semblant d’être ce genre de personne, mais il aurait été agréable qu’en traversant l’aéroport, je n’aie pas l’impression d’être le personnage principal masculin de n’importe quelle sitcom, vous savez, débordé et hors de son élément.

« Julie, ma chérie, te voilà enfin ! » Entendis-je dire une voix familière.

Regardant autour de moi tout en sortant de l’autre côté du petit bâtiment, je l’ai repéré. Lane n’était plus habillé comme un homme de pouvoir bien habillé. Il était habillé comme un mannequin sur un yacht dans une publicité pour du parfum.

Il portait une large chemise en lin avec un pantalon en toile blanc et des sandales en cuirs marron. La vache, il en jetait.

Lâchant immédiatement mes sacs, je courus vers lui, passais mes bras autour de lui et l’embrassais. Mon geste était joueur et sexy. J’avais vu Julia Roberts le faire dans un film.

« Lane, mon chéri, je suis tellement contente de te revoir, » dis-je avec un accent anglais parfait.

Lane me regarda comme s’il contestait mes choix de personnage puis fit un geste en direction de l’homme se tenant à ses côtés.

« Julie, je voudrais te présenter Reed. En fait, il est aussi allé à l’université avec nous. »

Je me tournais vers l’homme surpris se tenant à côté de Lane et me figeais. Il était plus que familier. Je connaissais Reed. Je le connaissais bien mieux que Lane. En fait, lui et moi avions un passif… Un long passif compliqué.

Est-ce une coïncidence ? Est-ce que Lane ignorait que Reed et moi nous connaissions à l’époque ? Ce devait être une coïncidence… Pas vrai ?

 

 

 

Chapitre 2

Reed

 

Il est impossible que ce soit une coïncidence. Il y a trois jours, Lane m’avait appelé pour me dire que je devais tout abandonner, car il avait quelqu’un à me présenter. Je lui ai demandé de qui il s’agissait, et il m’a dit que c’était sa fiancée.

Lane Toros était fiancé ? Impossible. Hon-hon. Lane consomme les femmes comme des tictacs. Il ne les voit pas comme des personnes. Pour lui, elles ne sont que des sommets à conquérir. Et c’est ce que je lui ai dit.

Mais il m’a dit qu’elle était différente. Qu’elle était spéciale et l’avait fait changer ! Il a dit qu’elle avait fait de lui un homme nouveau. À présent, je découvrais que cette femme qui voulait épouser était la même dont j’étais éperdument amoureux à l’université. Jamais cela ne pourrait être une coïncidence.

« Reed, j’aimerais te présenter Julie, ma fiancée », dit Lane, détendu, comme s’il ne savait pas qui elle était.

« Non, nous nous connaissons, Lane, » dis-je, récupérant toujours du choc. « Je veux dire, nous nous sommes bien rencontrés, pas vrai ? » Demandais-je à Julie, brusquement envahi par les souvenirs de notre passé compliqué.

« Oh non, nous nous connaissons, absolument », clarifia Julie.

« Oh ! Attendez, c’est vrai. Vous vous connaissez ! C’est exact ! » Dit Lane comme si cela lui revenait brusquement à l’esprit. « Le monde est petit, pas vrai ? » Continua-t-il tout en me faisant l’un de ses sourires énervant et passant ses bras autour des épaules de Julie. « Le vol s’est bien passé ma chérie ? Je n’ai pas à acheter ou vendre quoi que ce soit pour toi, pas vrai ? »

« C’est amusant que tu dises ça, » dit Julie, rendant son regard à Lane.

« Pourquoi ? » Demanda-t-il.

Julie sourit. « Pour rien. C’est juste amusant. Alors Reed, que deviens-tu ? Ça fait longtemps. On ne sait pas vus depuis la remise des diplômes. »

« Tu te souviens de ça ? » Lui demandais-je, étonné qu’elle se souvienne de quelque chose d’aussi trivial.

« Évidemment. Tu avais un de ces trucs à poids sur ta toge. Je me suis toujours demandé comment tu avais fait ça ? Avec des agrafes ? »

« Ouais ! » Dis-je, choqué qu’elle se souvienne de quelque chose d’aussi insignifiant. « Des agrafes. J’avais passé la nuit entière à courir avec… En fait, avec ton fiancé ci-présent. »

« Je me souviens de ça, » dit Lane, serrant Jules plus fort. « Tu te sentais obligé d’ajouter tes poids. Tu ne pouvais pas récupérer ton diplôme sans. »

Alors que Lane parlait de ça, je me rappelais cette nuit. « Tu t’es introduit dans le laboratoire pour trouver des agrafes, pas vrai ? »

« Tu menaçais de ne pas y aller si tu n’avais pas tes poids. Qu’étais-je censé faire ? » Me rappela Lane.

« C’est vrai, » dis-je, ayant complètement oublié que Lane avait aussi un côté doux.

« Quoi qu’il en soit, nous aurons plein de temps pour repenser à tout ça une fois sur l’ile. Reed, tu veux bien prendre les sacs de Julie ? Julie, c’est tout ce que tu as pris ? »

« Tu sais que j’aime voyager léger. »

« Oui, bien sûr chérie. Et c’est l’une des choses que j’aime chez toi, » dit Lane avant de frotter son nez contre celui de Julie et de l’embrasser.

En les regardant tous les deux, je n’étais pas certain de savoir ce qui se passait, mais j’étais sûr de ne pas aimer ça. Ça ne pouvait pas être une coïncidence. Et jamais Lane n’aurait oublié ce que je ressentais pour elle.

J’avais cessé de compter les fois où je lui avais parlé d’elle à l’époque. Je pouvais me souvenir de nos discussions jusqu’au lever du soleil. Je suppose que c’était principalement moi qui parlais, mais il ne pouvait quand même pas avoir oublié ça.

« Alors, comment vous êtes-vous rencontrés tous les deux ? » Demandais-je alors que je les ramenais chez moi.

« Lane ne t’a pas raconté ? » Me demanda Julie depuis l’arrière de la voiturette de golf.

« Non, en fait, Lane ne m’a rien dit à propos de vous deux. »

« Honte sur toi Lane. Si tu me permets mon cher. »

« Je t’en prie ma chérie. »

« Nous étions tous les deux à Calabasas… »

« J’ai une maison là-bas, » dit Lane d’un ton arrogant.

« En effet. Et j’avais récemment déménagé pour m’occuper de ma mère. »

« Oh, qu’est-ce qui ne va pas ? » Lui demandais-je, inquiet.

« Un cancer. Mais elle est en rémission. Tout va bien. »

« Ta mère a eu un cancer ? Je ne savais pas ; » Intervint Lane.

« Bien sûr que si. Je te l’ai dit. Tu savais que j’étais revenu à Calabasas pour m’occuper de ma mère. »

« Oh, attends. Oui, pour t’occuper de ta mère, bien sûr. Tu sais quoi, je pensais à quelqu’un d’autre. Je t’en prie, continue. »

« Bref, » continua Julie, « je travaillais dans une agence d’intérim… »

« Une agence d’intérim ? » Lui demandais-je, me souvenant brusquement de quelque chose.

« Ouais. Ne sachant pas combien de temps je resterais là, je pensais que ce serait plus facile. Quoi qu’il en soit, je venais d’être virée d’une mission lorsque j’ai décidé d’aller prendre un café. Et devine qui était dans le même café ? Lane Toros, de l’université. »

« C’était moi, » intervint Lane. « Puis, une chose menant à une autre, nous avons discuté et peu après, nous voilà. »

« Nous voilà, » confirma Julie.

« Waouh ! Je n’arrive pas à croire que ce genre de choses arrivent, » leur dis-je. « Je suppose que vous étiez faits l’un pour l’autre. »

« C’est exactement ça, » dit Lane, prenant la main de Julie dans la sienne.

Voyant un autre signe d’affection, je concentrais à nouveau mon attention sur les rues étroites et vides. Ça faisait beaucoup de choses à la fois. Il m’avait fallu longtemps pour oublier Julie. En fait, elle était une des raisons pour lesquelles j’avais déménagé après l’université.

Toute notre histoire m’avait retourné la tête. Je ne savais pas pourquoi, je ne parvenais jamais à trouver le courage de l’inviter. J’avais toujours eu l’impression qu’elle dirait oui si je l’avais fait, mais ce ne fut jamais le cas. Je ne savais pas pourquoi je ne l’avais pas fait. Peut-être que j’étais trop taré à l’époque. Merde, peut-être que je l’étais encore maintenant.

Je veux dire, qu’est-ce que j’avais fait de ma vie pendant que Lane devenait riche comme Crésus ? Rien. Je vivais dans la même maison en ruine que celle dans laquelle j’avais emménagé il y a dix ans à mon arrivée et j’avais à peine un dollar à mon nom.

Je vis les Johnson me faire signe alors que je m’approchais, je leur fis signe en retour et fis une note mentale pour me rappeler de passer les voir et leur dire bonjour lorsque je serais de retour de l’ile. Ils commençaient à vieillir et nous étions deux à nous occuper de leur jardon pour eux. Ce serait bientôt à mon tour.

« M. et Mme Johnson, comment vont Thelma et votre nouveau petit enfant ? »

« Elle va très bien, » dit M. Johnson après que je me sois garé devant lui.

« Vous savez si elle a eu les mangues que je lui ai laissées ? »

« Tu sais quoi, je crois que oui. »